Premier jeu et premier succès pour une toute jeune équipe qui deviendra quelques mois plus tard Legend Software ("Les Portes du Temps", "Ranx", "Nishiran", "1789, la Révolution"). Un mélange de monstres, de savant fou, de bonnes grosses giclées de sang et de l'humour (certes pas toujours subtil), La chose de Grotemburg est un jeu qui s'est vite imposé à tout aventurier de l'âge d'or de l' Amstrad.
Vous venez de vous installer dans un petit village avec votre femme, Germaine... vu son prénom, elle a plus 20ans c'est sûr. En rentrant d'un voyage d'affaire, horreur et damnation... la cuisine a été salie... et Germaine gît là par terre, sauvagement mutilée.. et il faut l'avouer morte. Il faudra faire marcher toutes vos petites cellules grises et beaucoup de perspicacité pour relier et dénouer toute cette affaire qui semble sortie d'un mauvais film d'horreur et répondre aux nombreuses questions qui torturent votre esprit : Qui a sali votre cuisine ? Pourquoi ca pu le rat mort dans le placard ? Et où Germaine a rangé ce foutu pack de Kro-tembourg (hi hi hi!!!!) ?
"La chose", cette chose venue d'ailleurs, peut être de l'espace mais rien à voir avec "The Thing" fabuleux film du maître J. Carpenter. Non cette chose vient d'autre part .... de Grotemburg, petit village allemand perdu dans les montagnes... non en fait là je m'égare un peu mais l'humour est aussi subtile que dans le jeu, c'est pour dire. Voila le type même du jeu qui m'a fait longtemps regretté de ne pas avoir un CPC 6128 tout comme le "Manoir de Mortevielle" car le jeu était quasi-introuvable sur CPC 464 bien qu'il soit sorti (j'ai eu confirmation par le graphiste Didier Quentin), qui a dû être tiré à une dizaine d' exemplaires ... les possesseurs de K7 étant toujours les plus mal lotis (argggh!!).
Oh rage ! oh désespoir quand je voyais les questions/réponses de ce bon vieux TILT Magazine ou de Joystick Hebdo sans avoir la possibilité de connaître ce jeu appelé tantôt "Chose de Grotemburg" tantôt "Grotembourg". Il faut dire que l'on se demande encore où ils ont été pêché un nom comme celui là ? Donc rendez-vous dans la section interview de Didier Quentin pour avoir le fin mot de l'histoire.
La découverte est donc malheureusement tardive, faute de temps, mais rien n'est plus gratifiant que d' achever une quête si longue. Si le jeu est un pur produit Ubi Soft dans la lignée de "Zombi", ce n'est que récemment que j'ai appris qu'on devait sa paternité à une toute jeune équipe composée notamment de Nicolas Gohin (programmeur) et Didier Quentin (graphiste) qui deviendront plus tard "Legend Software" connu pour "Les portes du temps" ou "Ranx", j'ai attribué intentionnellement ce jeu à "Legend Software" même si à cette époque la société n'existait pas encore. Le petit studio fermera définitivement ses portes après la sortie de "Nishiran" suite à des impayés de sa société éditrice 16/32 diffusion qui venait aussi de faire faillite.
Tout commence donc dans la cuisine où cette chose a décidé de laisser parler son côté artistique, en la repeignant en rouge... BEURK!! jaune ou vert ça aurait pu aller mais là c'en est trop; Germaine est là sur sa chaise sans bouger !!! mais elle est morte !!! Vous comprenez ainsi mieux le choix de la couleur. Votre propre enquête commence donc là. Premier pas, vous décidez de descendre la rue et la première rencontre avec Johnny, le clochard... il refoule un peu mais il est sympatoche. Il vous donnera quelques renseignements contre un bon vieux camembert coulant et légèrement périmé comme quoi rien ne se jette. Ensuite je vous laisse découvrir la suite mais sachez que vous y ferez divers rencontres aussi improbables que non dénué d'un certain humour au 3ème degré: Gainsbourg (no comment!), Rambo qui vous donnera son porte-bonheur : une grenade (ouahh!!!) ou même Don Camillo-Patillo ... ça vous donne un avant goût du jeu.
Le scénario est donc traité sur un ton décalé tout en abordant divers thèmes chers au cinéma fantastique comme le savant fou émule de docteur Jeckyl et Mr Hyde apparaissant sous les traits d' Albert Einstein. Cet inventeur a joué les apprentis sorciers et s'est créé son propre Frankenstein à partir des restes d'appartenance plus que douteuse pris dans divers cimetières, pour finir comme première victime de cette "chose", mais heureusement celle-ci tout comme Dracula a ses faiblesses, il faudra les découvrir ... mais vous en savez déjà trop.
Le jeu propose des graphismes fins en 320 x 200 donc peu colorés (4 couleurs), peut-être une exigence de l'éditeur qui commençait justement à transposer ces hits 8 bits sur Atari ST comme "Zombi"; Leur nombre est toutefois assez conséquent et variés mais d'une qualité fort inégale. Les bruitages sont assez rares voir inexistants, pas de musique non plus. Un analyseur syntaxique, particulièrement efficace vous permettra de vous déplacer et de faire certaines actions. Il reconnaît plus de 500 mots. Les réponses en retour sont souvent un vrai régal à prendre et c'est bien là toute la force du jeu et certainement le mélange fantastique/horreur et ce ton bien décalé qui a fait le succès du jeu.
Côté énigme, il faut malheureusement certaine fois une bonne dose d'imagination pour trouver quelques puzzles assez farfelues. Par exemple en tirant la queue d'un chat on découvre une souris qui permettra de domestiquer un hibou qui servira plus tard à se débarrasser de souris affamées...pas évident car illogique mais c'était souvent comme cela à l'époque. Une liste de verbes reconnus aurait été fort utile dans le manuel ou sur l'écran de jeu. Bon nombre de joueurs ont dû tourner en rond sans solution et je réalise maintenant le pourquoi du comment des questions fréquentes dans Joystick hebdo. On peut aussi regretter que si les divers écrans apportent leur lot d' hémoglobine, l'humour à profusion casse l'atmosphère d'épouvante qui aurait pu se dégager du soft et c'est fort dommage tant la potentialité du titre était forte. Il ne fera donc même pas peur même au plus jeune.
Finalement après presque une décennie, "La chose de Grotemburg-bourg" est un jeu qui est resté dans les mémoires mais pas là où on l'attendait. Une histoire abracadabrantesque, des énigmes à se frapper la tête sur l'écran où la logique est hasardeuse, bref un jeu régit par la loi de Murphy fait pour les enfants bercés par les films d'horreur des années 80. On aime ou on déteste mais le jeu ne vous laissera pas indifférent. Et moi j'aime.
Après autant d'attente, il faut se rendre à l'évidence, on se fait souvent de fausses idées sur un jeu qu'on n'a pas connu à sa sortie. Par ses previews, ses tests, ces diverses questions/réponses lues dans les mags de l'époque me laissaient entrevoir un jeu avec des possibilités multiples, très difficiles (il l'est) et horrifique (pas vraiment). C'est en partie le cas, "Grotemburg" est un jeu d'aventure varié mais le jeu dispose aussi d' un humour totalement décalé et assez inattendu. En bref une référence incontournable et beaucoup de joueur aimeront s'y (re-)plonger et qui sait pourquoi pas enfin le terminer... avis aux aventuriers nostalgiques.