Très populaire, et encore considéré comme l'un des meilleurs jeux de voiture (si ce n'est LE meilleur de course en 2D), « Out Run » a marqué l'histoire des salles d'arcade. SEGA nous convie au voyage dans cette balade limite bucolique et au luxe grand L au volant de cette belle italienne rouge rutilant avec l'option bimbo de service s'il vous plait. Pourtant derrière son image de road trip endiablé le long des plages de sable fin de Coco Beach et des paysages romantiques transalpins, de nos jours le jeu semble être l'objet de critiques, accusé par certains de véhiculer une image stéréotypé des années 80, superficielle et machiste. C'est oublier que lors de sa sortie le jeu faisait l'unanimité dans la presse et le bonheur des joueurs (et joueuses) du monde entier, quand à l'histoire de sa conception c'est un vrai parcours sinueux comme seul SEGA en avait parfois le secret...
A bord d'une belle cabriolet décapotable et bien accompagné, vous devez gagner cinq étapes en enchainant les kilomètres à pleine vitesse jusqu'à atteindre les 292 km/h à travers des paysages idylliques allant des plages de sable fin de Floride aux plaines verdoyantes de l'Allemagne jusqu'à la Côte d'Azur en traversant les Alpes suisses, une course oui mais à la limite du romantisme, dépaysement assuré...
Avant « Out Run » très peu de jeux de voiture avaient marqué les joueurs, et SEGA n'en avait produit aucun. Il faut dire que Namco avait monopolisé un peu cette catégorie avec son porte étendard aussi célèbre qu'un Pong ou un Pacman...
En 1982, Namco sort un jeu d'arcade qui va révolutionner le jeu de course non par ses graphismes mais plutôt en mettant pour la première fois le joueur au coeur de l'action en tant que pilote de F1, il s'agit bien sûr de « Pole Position » distribué par Atari. Avec ce jeu ce n'est ni plus ni moins qu'une nouvelle approche que le japonais propose dans les jeux, vous n'êtes plus spectateur mais acteur, placer dans la peau d'un pilote ou du moins on essaie de vous le faire croire par différents stratagèmes assez bien pensés : Vue à la 3ème personne, volant sur la borne, pédale d'accélération et même un levier de vitesse. Tout est fait pour contribuer à une immersion totale dans le jeu, et à vous faire dépenser plus. Et même si ses graphismes restent sommaire (on reste quand même en 1982), le jeu est suffisamment immersif et proposera même une version deluxe cabine assise dite « seated cabinet » avec les 2 pédales accélération et frein, çà en jette. Terriblement addictif, le jeu sera un succès planétaire.
De son côté SEGA lorgne sur le succès du jeu de Namco mais peine à trouver une nouvelle formule sans copier ce qui a déjà était fait. L'éditeur Nipppon s'essaie à quelques formules assez différentes en commençant par un jeu de course de moto GP500 « Hang-On »
Pour cela SEGA fait confiance à un certain Yu Suzuki, un petit surdoué de la programmation mais aussi un concepteur de génie, qui a fait les beaux jours de SEGA dans les années 80-90 et plus connu récemment pour la série Shenmue.
Très vite Suzuki prend la tête de la section AM2 du studio.
Sorti en 1985, « Hang-On » est un contre-la-montre dans lequel on pilote une moto pour gagner un championnat, les motos concurrentes sont elles contrôlées par le CPU. Hormis ces qualités indéniables c'est aussi l'un des premiers jeux d'arcade à utiliser des graphismes 16 bits, et même si trois petites années le sépare de « Pole Position », graphiquement c'est un gouffre, les détails, les couleurs, la fluidité tout dans « Hang-On » semble plus beaux que dans le jeu de Namco et pour enfoncer le clou SEGA sort même une version cabinet moto !
Autre innovation et de taille, le jeu utilise pour l'époque une technique d'affichage plutôt avant-gardiste appelée « sprite scaling » permettant d'afficher des décors 2D en simili-3D. Le procédé est plutôt simple sur le papier, suivant la position du joueur par rapport à un objet, comme un arbre au bord d'une route, celui-ci sera représenté avec une image plus ou moins petite. Plus le joueur sera loin de l'objet, plus l'image de cet objet sera petite, plus le joueur se rapprochera de lui, plus son image sera grande. Le revers de cette technique est qu'elle était très gourmande en mémoire et aussi en temps machine. Pour cela toutes les images à différentes échelles d'un même objet doivent être stockée dans la mémoire vive, et à l'époque on parlait de ram de quelques Kilo-octets même sur machine arcade. N'ayant ni l'un ni l'autre, ce type de technique d'affichage n'a presque jamais été utilisé sur les machines 8 bits à quelques rares exeption près.
A une époque où les processeurs dédiés à la rotation et au zoom de sprites n'existaient pas encore, cette technique a donné des résultats plutôt étonnants dans les années 80, on peut citer par exemple les jeux de course comme « Chase H.Q » (1988) de Taito et sa suite « S.C.I » (1989), « Cisco Heat » (1990) de Jaleco où vous conduisez une voiture de Police dans les rues vallonnées de San Francisco jusqu'à l'impressionnant rail shooter de SEGA « Rail Chase » (1991), et dans les tous derniers jeux utilisant cette technique "Jurassic Park" arcade (1994), mais la liste est bien plus longue.
« Hang-On » c'est aussi un hommage de Yu Suzuki au pilote de Louisiane Freddie Spencer surnommé « Fast Freddie », qui, en 1983 à l'âge de 21 ans, devient le plus jeune champion du monde de GP500, championnat qu'il remporta tout de même trois fois.
Le style de pilotage de Freddie Spencer était tellement bon, et mon jeu était comme un hommage. C'est la raison pour laquelle je voulais le faire - Freddie Spencer, il conduisait une moto Honda, et j'ai adoré la façon dont il s'est accroché! [« Hang-On » dans le texte]
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Avec le recul, on peut voir dans les qualités de « Hang-On » les prémices d'« Out Run ».
Après la sortie de « Hang-On », SEGA décide de s'essayer à un autre registre et se lance la même année sur « Space Harrier », un shoot techniquement impressionnant, à l'action non-stop et qui de surcroit propose un scrolling vers l'avant utilisant toujours la technique optimisée d'affichage dite cette fois de « Super Scaler » donnant au jeu un scrolling irréprochable.
Sur le processus de création Suzuki dans une de ces nombreuses interviews a donné plus d'informations :
à l'origine, le « Harrier » dans le titre devait être un avion de chasse français capable de décoller verticalement (VTOL), les documents de planification indiquaient un jeu où cet avion volerait en faisant exploser des cibles terrestres et aériennes. C'est ce qui m'a été remis lorsque nous avons commencé. En fait, en y repensant maintenant, j'ai l'impression que ce document de planification faisait plus de 100 pages:[rires]
Pour faire simple, l'idée était un peu trop avancée pour l'époque : trop de puissance de traitement aurait été nécessaire. La mémoire graphique était également très petite. Nous voulions que l'avion bouge en douceur. Pour obtenir cet effet, il est nécessaire de changer de modèle ; si nous utilisions un corps humain, nous pourrions le faire en utilisant le nombre minimum de sprites. C'est pour cela que nous avons décidé de faire voler une personne à la place.
Une personne volante n'avait vraiment de sens que dans le monde de la science-fiction. Et pour cette immersion, il y avait quelqu'un que j'admirais : Roger Dean qui a illustré les couvertures du groupe progressif « Yes » . Il y avait aussi, un films que j'aimais « The Never Ending Story ». Je voulais créer un monde fantastique, en m'inspirant d'éléments comme ceux-ci.
Le motif en damier du sol a contribué à donner une impression de vitesse. Et cela n'a pas consommé un seul tampon d'image, il était donc possible d'utiliser un calque séparé pour l'arrière-plan. Nous avons essayé beaucoup d'idées différentes, mais la palette de couleurs pastel a permis d'obtenir un ciel avec de nombreux jolis dégradés de couleurs, une ligne d'horizon parfaitement adaptée à un jeu fantastique.
Ce qui est resté de la proposition originale que j'ai reçue n'est en réalité que le nom « Harrier ». J'ai mis le mot "Space" devant, pour le rendre plus fantastique. A part ça, nous avons changé à peu près tout le reste [rires] .
Quoi qu'il en soit, les jeux de tir en 3D étaient alors un peu tabous. Jusqu'à Space Harrier, ils avaient tous été des échecs.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Une andecdote méconnue que partage Suzuki c'est que comme souvent dans tout processus créatif des bugs apparaissent et parfois ils finissent dans le jeu ...
La couleur du ciel était aussi quelque chose qui venait d'un bug, de l'effacement de la RAM couleur sur le PCB. A l'époque, on avait travaillé sur un joli fond de ciel avec de jolis dégradés de couleurs: et bon, c'est un peu une parenthèse, mais le président Nakayama avait l'habitude de visiter notre bureau de temps en temps.
Le truc avec Nakayama, c'est que s'il voyait que les graphismes étaient complets dans votre jeu, il pouvait vous dire que c'était fini et qu'il était temps de le sortir. Néanmoins, nous ne pouvions pas simplement lui cacher le jeu et ne rien lui montrer quand il passait. J'ai donc installé un petit interrupteur sous mon bureau:[rires]
Quand j'appuyais sur ce commutateur, la RAM couleur s'effacait. Nous pouvions effacer la RAM couleur, mais cela n'affectait pas le reste du jeu - tout continuait à fonctionner, seules les couleurs étaient erronnées. Pour un profane, il semblait que le jeu n'était pas encore terminé. Une fois, nous avons fait cela, et par hasard, les couleurs du ciel semblaient extrêmement frappantes. Ensuite, j'ai utilisé notre outil de développement ICE pour arrêter le processeur et extraire les données de la RAM couleur, et celles-ci sont devenues les couleurs que nous avons utilisées pour Space Harrier.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Techniquement impressionnant, le jeu d'arcade a eut énormément de succès et fut transposé sur pratiquement tous les ordinateurs et consoles de l'époque. A noter que la conversion Atari ST d' Elite fut l'un des premiers jeu de Paul Cuisset (Les Voyageurs du Temps, Operation Stealth, Croisière pour un Cadavre, Flashback...). Au final « Space Harrier » apporte à « Out Run » une toute nouvelle technique du Super Scaler rendant les jeux plus impressionnants et aussi plus fluides.
Sorti en septembre 1986, « Enduro Racer » est sans doute un des jeux les moins connu de Suzuki, peut être parce qu'il reprend le principe d'Hang-On mais dans un univers moto-cross. Conçu en parallèle du développement d'« Out Run », Yu Suzuki y affecte une partie de l'équipe sur le développement du jeu. Même si le jeu apporte quelques nouveautés au gameplay comme des montées et descentes, le fait de pouvoir faire une roue arrière en sautant depuis des tremplins, le jeu n'est pas suffisamment impressionnant, il manque de finition. Non seulement les animations des sprites sont réduites au minimum, mais le jeu souffre d'une mauvaise maniabilité puisqu'il est difficile de tourner à grande vitesse. Sans doute a t-il bénéficié de moins d'attention et de moins de temps que les deux précédents jeux pour son développement, Suzuki étant partie faire son tour d'Europe pour conceptualiser "Out Run". Les sprites ne sont pas très détaillées, manque de frames seuls quelques images composent les animations. Le jeu est au final assez décevant même pour ceux l'ayant connu à l'époque sur borne d'arcade
« Enduro Racer » n'est pas resté dans les mémoires, d'ailleurs Suzuki ne l'aborde jamais dans ses interviews. Sur 8 et 16 bits le jeu ne fut convertit que médiocrement, même si elle fut annoncée la version Amiga ne verra finalement jamais le jour. Mais grâce à ses tracés valonnés, Enduro Racer a permis à « Out Run » de proposer des parcours plus réalistes et moins monotones.
La première ébauche d' « Out Run » remonterait à juillet 1985, lorsque SEGA dépose un document de conception pour un jeu portant le nom de code « Dead Heat ». Pour l'entreprise japonaise il s'agissait de réitérer non seulement le succès de « Hang-On » mais aussi essayer de concurrencer le très populaire « Pole position ».
Dans ce document original, exposé dans son intégralité lors de la conférence CEDEC 2019, le premier jet de ce qui deviendra « Out Run » proposait initialement un jeu basé sur la F1, avec la possibilité d'affronter un joueur concurrent, IA ou personne on ne sait pas, peut-être les deux. Ce document montre aussi des dessins conceptuels avec des embranchements et des pentes, deux caractéristiques qui ont le sait seront dans le modèle final.
Décembre 1985, changement de design, la F1 laisse la place aux voitures de sport avec au passage l'abandon de la fonctionnalité multijoueur :pour des raisons budgétaires. En contrepartie l'accent est mis sur les bords de route afin de les rendre aussi intéressants et riches que possible. On peut voir sur les quelques croquis des montagnes, une Porche, une Coccinelle, le design s'approche un peu plus d' « Out Run », la route elle reste par contre très circuit de F1. Le jeu porte désormais le nom de code « Spark Rally » .
Début 1986, un nouveau document de conception est émis, il porte les noms de Youji Ishii, I. Yutani et Motoshige Hokoyama (qui a ensuite dirigé « Shadow Dancer »). Le jeu s'appelle désormais « Out Run ».
Youji Ishii, a rejoint Sega en 1978, il a travaillé avec Yu Suzuki notamment sur « Hang-On ». Il a géré au départ le projet « Out Run » en s'occupant des éléments de production. Il était le patron de Yu Suzuki. Son rôle serait équivalent à celui d'un producteur exécutif ou d'un chef de studio dans la terminologie du développement occidental.
Dans un interview publiée dans "The Untold History of Japanese Game Developers Vol 3", Ishii attribue une grande partie de la vision créative d' « Out Run » à Yu Suzuki, pourtant si l'homme a contribué dans un premier temps au concept original, il ne figure même pas dans le tableau des hi-scores du jeu.
« Out Run » a été développé par une petite équipe sur une période de huit à dix mois. L'équipe aurait été composée de quatre programmeurs, cinq graphistes et d'un créateur des effets sonores et serait passée de Space Harrier, qui contient dans son code une date cachée de novembre 1985 à « Out Run » en septembre 1986 avec au passage des bouts de code qui seront repris.
Avril 1986, 5 mois après le début de la production, Ishii et Suzuki réussissent à convaincre SEGA de les envoyer en voyage afin de faire des repérages pour « Out Run ». Le plan initial était de partir à New York et de traverser l'Amérique. Cette idée de road trip aurait été influencé par le film « The CannonBall Run » sorti en 1981 avec Burt Reynolds ; mais à la dernière minute le road trip bifurque vers l'Europe (chez nous il s'agit plutôt du Gumball 3000 » qui traverse l'Europe, l'Asie et les Etats-Unis). Ishii affirme que Hayao Nakayama, le chef de Sega, pensait que ce serait trop dangereux. Le souvenir des événements de Suzuki est lui quelque peu diffèrent :
L'impulsion principale derrière la création d'Out Run était mon amour pour un film intitulé "The Cannonball Run". J'ai pensé que ce serait bien de faire un jeu comme ça. Le film traverse l'Amérique, j'ai donc prévu de suivre le même parcours et de collecter des données au fur et à mesure. Mais j'ai réalisé, une fois que j'avais tout arrangé, que le paysage le long du parcours [panaméricain] ne changeait pas beaucoup en fait, alors j'ai révisé mon plan et décidé de collecter à la place les données en Europe.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Cette approche non conventionnel dans les années 80 pour apporter à son jeu le plus de réalisme, lance donc Suzuki dans une aventure enropéenne riche qui l'aménera à traverser essentielement l'Europe de l'Ouest.
En raison du concept « transcontinental », j'ai pensé que je devais d'abord suivre moi-même un tel voyage, en collectant des informations avec une caméra vidéo, un appareil photo et d'autres équipements. J'ai commencé à Francfort, où j'ai loué une voiture de location, et j'ai installé une caméra vidéo sur la voiture. J'ai fait le tour de Monaco et de Monte-Carlo, le long des routes de montagne de la Suisse, m'arrêtant dans des hôtels à Milan, Venise et Rome, collectant des données pendant quinze jours. J'ai beaucoup de souvenirs heureux de ce voyage. Il y avait de nombreux endroits que j'ai visités où communiquer en anglais n'était pas suffisant : une fois, lors de la commande d'un repas, je pensais avoir demandé [dans une langue européenne] un seul bol de soupe mais j'ai été surpris quand quatre bols de soupe ont été apportés! [rires]
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Ce changement d'orientation en cours de développement explique sans doute pourquoi « Out Run » débute avec ses longues plages de sables fins bordées de palmier sur la ville côtière de Coconut Beach en Floride, avant de revenir à des décors plus européens. Ishii et Suzuki citent tous deux la route romantique en Allemagne comme une influence particulière. Sur près de 350 km, du Main jusqu'aux Alpes, elle traverse la Franconie, la Haute-Bavière. Il est raisonnable de supposer que Coconut Beach a été développé avant le voyage, car une première variante test de ce niveau est encore présente en bêta dans les ROM du jeu.
Mais aussi puissant qu'était la firme niponne, SEGA et Suzuki avait leur limite, financière d'abord mais aussi lier par le matériel hardware de l'époque. En raison de ces facteurs et d'autres, notamment un manque de temps, Yu Suzuki a dû nécessairement faire quelques compromis lors du développement d'Out Run. Il s'avère que ces coupes n'ont pas été au détriment du gameplay, mais Suzuki était instinctivement mécontent d'être contraint de sacrifier l'une de ses idées :
Je n'ai pu mettre qu'environ la moitié des choses que je voulais faire dans Out Run. En raison du budget et limites du temps de développement, certains des contenus que j'avais prévus ont dû être compressés ou coupés. J'avais fait des préparatifs pour huit personnages individuels et je voulais inclure divers événements à chaque point de contrôle, ce qui aurait fait vivre au joueur une histoire; quelque chose comme le film "Cannonball Run". Je voulais aussi donner aux joueurs un choix de supercars à conduire, afin qu'ils puissent profiter des différences de performances des voitures.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Concernant le choix de la voiture et le fait qu'on doit se contenter d'une seule, Suzuki apporte les réponses :
Naturellement, j'avais envie de Ferrari, et par-dessus tout, la voiture dont on parlait le plus à l'époque était la Ferrari Testarossa 12 cylindres. La première fois que j'ai vu la voiture, c'était à Monaco, et j'ai été vraiment ému par sa beauté - je me suis dit "il n'y avait pas le choix : c'est celle-ci". Il y avait beaucoup d'autres belles Ferrari, mais des problèmes de mémoire ont rendu impossible leur inclusion dans le jeu... Nous avons donc décidé que la voiture du joueur devait être la Testarossa 12 cylindres.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Out Run propose des paysages très variés, on est loin des tristes décors monotones des circuits de F1 du jeu de Namco, Suzuki fait clairement la part belle à la diversité des zones traversées, d'ailleurs il explique que l'accent mis sur le paysage était délibéré :
Je voulais faire un jeu où vous pourriez profiter de magnifiques paysages changeants tout en conduisant, et vraiment avoir une sensation agréable en y jouant - pas un style de jeu de course stoïque.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
De l'utilisation d'une Testarossa et du choix de Coconut Beach comme première étape du jeu, aux noms des pistes de la bandes sonores (brise, vague, douche) jusqu'aux différentes nuances pastel utilisées pour dessiner le ciel, dans Out Run on ressent presque cette petite brise de vent frais sur son visage; le jeu parfait pour l'été. Et c'est exactement ce que Suzuki a cherché à faire.
Je voulais créer des scènes où l'on pouvait sentir le parfum frais des nouvelles feuilles et fleurs, comme dans les vertes prairies de la Suisse, alors je suis heureux que le joueur a pu le sentir.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Au total le jeu comporte quinze tronçons possibles et cinq fins différentes. Plus vous allez vers la gauche, plus cela sera facile et, inversement, plus vous allez vers la droite et plus cela sera difficile.
S'il est bien connu qu' « Out Run » est en partie inspiré du film « The Cannonball Run » et d'un road trips européen de Yu Suzuki comme il l'a indiqué dans de nombreuses interviews ; d'ailleurs le film est même mentionné dans le document de conception originale du jeu.
Bien que les autres programmeurs et graphistes travaillant sur Out Run semblent, selon Suzuki, avoir eu peu d'influence sur la construction du jeu, il est cependant important de noter les autres influences d' « Out Run » moins connues mais tout aussi importantes comme celle de l'artiste japonais Hiroshi Nagai . Son travail présente de nombreuses routes adjacentes à une mer d'un bleu brillant, un feuillage éclatant, des palmiers et la palette de couleurs que les fans d'OutRun reconnaîtront.
Fait intéressant, Nagai fournit la pochette d'un album japonais de 1982, intitulé September Wind, composé par Naoya Matsuoka & Wesing. Compositeur d'OutRun, Hiroshi Kawaguchi fait référence au travail de Matsuoka comme source d' inspiration directe pour la partition d'OutRun, affirmant que sans lui, OutRun n'aurait pas vu le jour.
A l'instar de l'écran de sélection des musiques dans « Out Run », l'album présente des bruits de vagues qui se brisent. Certaines des mélodies d' « Out Run » comme « Passing Breeze » sont clairement influencées par les morceaux de l'album notamment des similitudes avec le titre « A Season of Love » .
Même si « Out Run » ne comporte que 4 musiques, la bande originale d'Out Run composée par Hiroshi Kawaguchi (l'artiste anciennement connu sous le nom de Hiroshi Miyauchi) est l'un des exemples les plus réussi et les plus durables de la musique de jeu vidéo japonaise et devient une pierre angulaire du jeu.
« Out Run » offre aux joueurs un choix de trois morceaux - "Passing Breeze", "Magical Sound Shower" et "Splash Wave" - via un écran stéréo de voiture avant le début de l'action. Une autre musique "Last Wave" est utilisé dans les hi-scores mais non sélectionnable sur l'autoradio.
à l'époque, je faisais partie du « 8th R&D Department », qui était une équipe de développement de jeux d'arcade dirigée par M. Yu Suzuki. Cependant, je travaillais aussi sur des jeux pour le marché grand public. Je n'ai pas changé la façon dont je composais les chansons en fonction du matériel, mais je voulais utiliser l'efficacité sonore du matériel au maximum de son potentiel lors de la création d'une chanson.
Hiroshi Kawaguchi, « Out Run » Sound Lead
Sur l'origine d'« Out Run » et la conception musicale, Hiro dévoile ses inspirations:
à l'origine, le jeu a été créé avec l'idée de parcourir un parcours sur la côte ouest des États-Unis, donc la musique était basée sur la musique qui sortirait des haut-parleurs de la voiture, avec trois chansons de trois genres différents. On m'a dit de faire du rock la première chanson et de la fusion de la deuxième chanson, et de faire ce que je voulais pour la troisième chanson, alors j'ai choisi la musique latine. Cette chanson a fini par être Magical Sound Shower , qui a été influencée à 1000% par le travail de Naoya Matsuoka. Si je n'avais jamais entendu sa musique, cette chanson n'aurait jamais vu le jour.
Hiroshi Kawaguchi, « Out Run » Sound Lead
Les musiques accrocheuses fleurent l'insouciance, le rythme s'adaptant parfaitement aux paysages qui défilent et au but recherché par son créateur, la balade ; un peu moins à la sensation de vitesse que pourrait insuffler d'être au volant d'une Testarossa, on est bien loin des musiques explosives d'un Wipeout. Cela s'explique en partie par l'engagement équilibré de Yu Suzuki envers les aspects sonores, visuels et réactifs d' « Out Run » - "Je ne pouvais pas considérer le jeu et la musique comme des choses détachées et séparées".
Hiroshi Kawaguchi, après avoir travaillé avec Suzuki pour produire la musique de Hang-On, commençait à comprendre souhaits et sa façon de penser. Quant à sa musique préférée dans Out Run Yu Suzuki répond sans hésiter : Magical Sound Shower."
Hiro fait référence à Naoya Matsuoka et Cassiopeia comme des influences directes sur la bande originale d'Out Run.
Si je n'avais pas entendu les chansons de M. Naoya Matsuoka, je ne pense pas que la musique d' « Out Run » serait née.
Hiroshi Kawaguchi, « Out Run » Sound Lead
Yu Suzuki indique dans une interview avoir donné aussi ses instructions quand à ses attentes sur le score d'Out Run.
J'ai expliqué en détail à l'ingénieur du son le type de mélodies nécessaires. Je lui ai dit qu'en gros je voulais des rythmes rock à huit temps à un tempo de 150bpm. Je me souviens avoir sélectionné un certain nombre de morceaux à utiliser comme points de référence. à cette époque, nous ne pouvions pas utiliser d'échantillonneurs ou de sources sonores PCM, donc le timbre des morceaux était une création de synthétiseur, ce qui nous a conduit à avoir des difficultés lorsque nous avons essayé de réduire les quantités de données pour la lecture des morceaux. Je me souviens avoir voulu des guitares et des voix dans la bande originale, mais c'était impossible à réaliser avec la technologie de l'époque, alors j'ai finalement dû abandonner.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
Récemment, je suis devenu plus motivé pour créer mon propre genre musical original. C'est en partie parce que SEGA a commencé à reconnaître le travail parallèle et produit des albums originaux: Je suis assez content, et en même temps je trouve très intéressant que la musique que j'ai faite pour des jeux comme Out Run et Fantasy Zone , à la fois où je n'ai pensé à rien de tout cela, est tellement respecté maintenant
Hiroshi Kawaguchi, « Out Run » Sound Lead
Suffisamment respectée pour inspirer un album en 2013 à l'artiste français Vincent Belorgey, alias Kavinsky symboliquement intitulé « Out Run » avouant : « C'est un hommage, pourrait-on dire, à un jeu auquel je jouais beaucoup »
Apparu au passage du millénium grâce à l'influence de la scène electro française, le courant musical « Synthwave » également appelée « Retrowave », est un genre plutôt confidentiel au départ, mais quasiment devenue "mainstream" notamment grâce à ses liens étroits avec la pop culture, en particulier le cinéma et les jeux vidéo. Cette musique atmosphérique, souvent électronique rappelant les films d'horreur trash du réalisateur italien culte, Dario Argento donnant à Kavinsky une première musique à succès « Nightcall » plutôt sombre, qui fut reprise dans le film de course/poursuite « Drive » (2011) avec Ryan Gosling, mettant un peu plus en lumière ce style musical.
Depuis elle a envahit l'univers des séries TV qui surfe sur la nostalgie des années 80 et du « c'était mieux avant », des thèmes qu'on retrouve dans la série Netflix « Stranger Things » ou des films « Super 8 », « Summer 1984 »...
Le succès du film Drive en 2011, va donner un sérieux coup de projecteur au genre, et particulièrement à l'une de ses branches, c'est-à-dire la synthwave. Sur la bande originale du film, on retrouve Kavinsky avec son désormais célèbre "Nightcall". Depuis, le genre connait différentes variantes parmi lesquelles la darksynth, la dreamwave, la vaporwave ou encore la cybersynth.
David Grellier (aka College), autre artiste français pivot de ce courant musical, explique que sa musique s'inspire : « des soaps des années '80 et d'un esthétisme que j'adore tout particulièrement : la couleur, les images, les films et le soleil - les images de Los Angeles, de Chicago et de toutes les autres villes [...] qui continuent à me fasciner. »
Le score d' « Out Run » devient une référence aux années 80 et aux séries T.V de cette époque comme « Magnum » ou « Miami Vice » dont s'inspire ces différents artistes, dont Kavinsky.
Pour un tel projet et avec le résultat qu'on lui connait, il est surprenant d'entendre que l'équipe derrière Out Run était en grande partie un groupe d'individus rassemblés au hasard au sein de SEGA.
L'équipe se composait de quatre programmeurs, cinq graphistes et un créateur sonore et nous avons fait fabriquer le cabinet [coin-op] en faisant appel à une autre équipe. L'équipe de développement du jeu était composée de personnes qui étaient disponibles à ce moment-là, je n'ai donc pas pu constituer l'équipe selon mes souhaits. j'ai écrit moi-même toutes les parties importantes de la planification et de la programmation ; Je ne pense pas que quoi que ce soit ait été vraiment influencé par l'équipe de développement. Je me souviens de l'essentiel des travaux de développement qui duraient entre huit et dix mois. Cependant, pendant ces huit à dix mois, je vivais presque à SEGA [rires].
Yu Suzuki, SEGA Lead Project
C'est connu comme un fait indubitable, dans les années 80 les éditeurs de jeux vidéo en particulier les plus gros ne voulaient pas mettre en avant les équipes en charge des développements des jeux, l'explication est peut-être double. Première hypothèse notamment dans la culture japonaise, l'individu en tant que salarié fait partie d'un tout collectif, globalisé dans l'entreprise, il ne doit jamais prendre de décision seul, ce qu'il produit ou imagine il le fait pour l'équipe, pour l'entreprise, au final c'est l'entreprise qui en tire tout le mérite... ou en subit l'échec. Une autre hypothèse serait que dans ce marché de niche, fortement concurrentiel ces entreprises ne nous voulaient pas que leurs développeurs vedettes se fassent connaitre et partent chez la concurrence.
Le résultat est que beaucoup d'ancien jeu ne sont malheureusement pas crédités et avec le temps, il devient de plus en plus difficile d'identifier qui était derrière tel ou tel partie artistique, seuls quelques initiales ou acronymes restant dans les hi-scores peuvent parfois nous guider sur une possible participation d'une personne du studio présent à cette époque.
Alors qui a participé à la création d' « Out Run » ? Si pour deux personnes on est sûr, pour le reste c'est plus énigmatique et il faut aller à la pêche aux infos. Une première piste se trouve comme toujours du côté des hi-scores, sept entrées sur l' équipe du studio SEGA-AM2 qui devait comporter une dizaine de personnes environ. Comme toujours ça démarre facilement, mais ensuite çà se gâte.
1. YU. Evidemment son créateur Yu Suzuki, responsable créatif et planificateur sur « Out Run », mais également un programmeur émérite. Il a mentionné dans une interview : « J'ai écrit moi-même toutes les parties importantes de planification et de programmation ; je ne pense pas que quoi que ce soit ait été vraiment influencé par l'équipe de développement.
C'est son nom qui est présent dans l'Easter Egg, indiquant son rôle dans l'élaboration du code du programme. Avec une si petite équipe de développement, il est clair que de nombreuses personnes portaient plusieurs casquettes et Suzuki ne fait pas exception. Il convient également de noter que Suzuki a composé quelques morceaux de musique pour « Space Harrier », notamment Ida et Valda. Les équipes SEGA étaient composées d'individus aux multiples talents.
2. BIN. Il s'agit en fait de Satoshi Mifune, connu aussi sous le pseudo Bin-Chan. Il a rejoint Sega en avril 1985 et n'a alors que 18 ans. Son premier projet était un second rôle sur Hang-On, où il a d'abord travaillé avec Yu Suzuki. à partir de là, Mifune a programmé des projets de grande envergure, notamment Space Harrier, OutRun, AfterBurner, Dynamite Dux, Turbo OutRun jusqu'à Virtua Striker et même Shenmue !
3. KAG est certainement Takafumi Kagaya, un designer AM2 crédité sur « Daytona USA », « Virtua Cop » et « Virtua Figher » entre autres titres. L'entrée de KAG sur le tableau des meilleurs scores de Daytona USA joue un jingle caché. Il n'est pas déraisonnable de supposer qu'il a pu travailler sur « Out Run ».
4. MI est évidemment Hiroshi Miyauchi, plus communément appelé Hiroshi Kawaguchi ou tout simplement Hiro. L'un des compositeurs de longue date de Sega et aussi l'un des plus prolifiques et les plus célèbres de l'histoire des jeux vidéo. Initialement Hiro a rejoint Sega en tant que programmeur, néanmoins à une période où les développeurs avaient de multiples casquettes, il commence à composer certaines musiques et grâce à ses compétences de programmeur, il écrit lui même les pilotes audio chez SEGA pendant cette période.
En termes de prise de décision créative, il existe un désaccord léger quant à savoir qui a suggéré certaines fonctionnalités, contredisant les affirmations de Suzuki selon lesquelles il ne se serait appuyé sur l'équipe de développement que pour obtenir des informations.
Au cours d'une interview, le compositeur de Sega, Takenobu Mitsuyoshi, plaisante en disant que Suzuki aimait généralement assumer la propriété des idées. Hiro se souvient quant à lui :
Yu Suzuki avait l'habitude de dire qu'il avait proposé [l'idée de la sélection musicale d'OutRun] lui-même mais il me semble que le concepteur a créé cet écran de radio et a dit : "Hé, si c'est une radio, on devrait pouvoir sélectionner ses propres chansons !" Je me souviens, cependant, qu'à l'origine l'écran ne montrait pas la main. La conception originale n'était que le tableau de bord de la voiture. Mais une fois qu'on pouvait sélectionner les musiques, j'ai demandé à Yu Suzuki si nous devions avoir un curseur ou un indicateur sur l'écran pour montrer aux gens qu'ils pouvaient choisir leur musique. En fin de compte, j'ai décidé que nous n'avions pas besoin de faire ça.
Hiroshi Kawaguchi, « Out Run » Sound Lead
5. MAT est le programmeur Tetsu Matsushima . Comme beaucoup d'autres membres de l'équipe, il a travaillé sur « Space Harrier », « Out Run » puis « AfterBurner ».
6. IKA et AO. Malheureusement, à l'heure actuelle impossible d'identifier ces personnes.
Finalement malgré les déclarations de paternités de Suzuki, il ne serait pas juste de dire que ce jeu n'est l'oeuvre que d'un seul homme, mais la conjugaison de multiples talents différents. Hiro, Mifune et Matsushima semblent être une équipe soudée qui a migré de « Space Harrier » vers « Out Run », avant de se rendre dans leur bureau de Skunkworks Studio 128 pour développer AfterBurner. Le style graphique de ces trois titres est également cohérent, ce qui suggère que de nombreux artistes sont passés d'un projet à l'autre.
Out Run a été un énorme succès dans le monde entier. SEGA a vendu plus 30 000 machines, ce qui en fait le jeu d'arcade le plus vendu de SEGA dans les années 80.
Yu Suzuki voulait faire d'Out Run une expérience plus importante - pas seulement quelque chose qui plaise aux yeux et aux oreilles - d'où les concept cabinets qui ont été conçu autour du jeu, certains étaient capables de fournir un retour de force aux joueurs à des moments appropriés, comme lorsque la Testarossa s'écrasait sur un panneau indicateur en bordure de route. Il y avait quatre versions de cabine OutRun - les types mobiles Deluxe et Standard, un montant avec une roue à retour de force uniquement et une version cockpit sans un tel mouvement. L'attrait des versions DX et SD à retour de force était écrasant et toutes ces armoires prestigieuses utilisaient des moniteurs de la meilleure marque possibles à l'époque, Nanao assurant un affichage ultra-rapide des sprites et les routes sinueuses d'Out Run. Pourtant pour des raisons de réduction des coûts de production, SEGA a aussi utilisé des écrans Samsung de qualité inférieure - et tandis que les écrans Nanao restaient lumineux, ceux de Samsung étaient sujets à des brûlures d'écran et accusaient des signes prématurés de vieillissement.
Les machines « Out Run » et particulièrement la version assise, ont eu un succès certains sur les joueurs de salles d'arcade ; aucun jeu de conduite précédent n'avait inspiré un tel engouement même pas « Pole Position ». Vers 1988, il était courant au Japon de trouver des machines « Out Run » avec des leviers de vitesses cassés.
Concernant les conversions c'est malheureusement un peu plus mitigé, et on peut séparer celles-ci en deux groupes, les versions console essentiellement supervisées et contrôlées par SEGA. Ainsi la version PC Engine est d'une qualité indéniable, certainement ce qui se faisait de plus proche de l'arcade à domicile, suivie de près par la version Megadrive.
Côté micro aux manettes l'une des sociétés britaniques phares des conversions arcade, US Gold. SEGA ne s'intéressant pas vraiment à la qualité des conversions micros, finalement c'est la douche froide. Passons les versions 8 bits qui ont quand même réussie à passer le quart de million de vente pour Noël rien qu'au Royaume-Uni, ce qui en a faisait le jeu le plus vendu de l'année, les versions Atari ST et Amiga développées par Probe, sont tout aussi catastrophiques sur des ordinateurs normalement considérés comme le haut de gamme de l'époque (et supérieur à la PC Engine)... Merci qui ? Merci U.S Gold et Probe Software
Avec le succès d'Out Run, différents jeux sont sortis en reprenant le concept avec plus ou moins de réussite :
- « Turbo OutRun » (1989), une refonte radicale du jeu : La F40 remplace la Testarossa, un bouton pour activer un turbo marquant un besoin de renouveler la formule, tout comme l'apparition d'obstacles et des courses poursuites avec la police, F40 + police on se croirait presque dans « Crazy Cars II ». Les graphismes sont assez variés mais pas inoubliables, les décors notamment ceux en ville sont sympa, malheureusement si en 1986 Out Run était un modèle de beauté, en 1989 les graphismes n'ont pas excessivement évolué, or beaucoup de jeux sont venus chatouiller la licence de SEGA, et souvent assez brillamment « Chase HQ » et « S.C.I » de Taito pour ne citer qu'eux. Enfin côté musique rien d'inoubliable ou plutôt vite oubliable.
- « Battle Out Run » (1990) était une bizarrerie sortie exclusivement sur la Master System. Un jeu évidemment fortement inspiré du hit d'arcade de Taito, « Chase HQ ». Dans chacune des huit étapes basées aux États-Unis, les joueurs étaient chargés de poursuivre des camions, puis de rattraper un criminel en le percutant pour le faire sortir de la route. Le jeu a plutôt été bien accueilli par la presse de l'époque au printemps 1990.
- « Out Run Europa » (1991) n'est pas un jeu de SEGA, mais une pure invention d' US Gold qui a réussi à marchander la licence pour une suite purement spéculative. Développé par Probe Software, les mêmes qui ont fait les conversions micro d'Out Run. Le jeu est sorti sur à peu près tout ce qui existait comme support à l'époque : Amiga, Amstrad CPC, Atari ST, Commodore 64, Game Gear, Master System et ZX Spectrum. Le jeu est assez déroutant, au début la Ferrari laisse la place à une moto ! puis un scooter des mers, une Porsche, etc: des courses/poursuites avec la police, des armes,: le jeu est assez varié et graphiquement c'est plutôt réussi, par contre musicalement couper le son tellement c'est agaçant.
- « Out Run 2019 » (1993) est un jeu de course futuriste sorti exclusivement sur Megadrive. A l'origine le jeu n'était pas une licence « Out Run ». La filiale de SEGA, SIMS travaillait avec Hertz pour créer un jeu de course futuriste pour le Mega-CD intitulé « Cyber Road », mais au milieu de l'année 1992, les plans avaient changé, le projet étant déplacé vers la Megadrive et renommé « Junker's High ». Le jeu partageait certains points communs avec les précédents jeux « Out Run » - des chemins de branchement, un mode turbo boost: et finalement il sorti sous la licence « Out Run ». A sa sortie le jeu reçoit des accueils mitigés, des couleurs et les décors étaient ternes bien loin des belles plages d' « Out Run », on pouvait sortir de route, finalement le jeu tiens plus du « F-Zero » que du jeu de SEGA.
- « OutRunners » (1992) développé par SEGA équipe AM1 sur le nouvel hardware System 32. Retour au traditionnel « Out Run » format ciel bleu, embranchement et belle blonde (et brune). La plus grande nouveauté est l'introduction de la course multijoueur. Selon le nombre de machines d'arcade reliées (jusqu'à huit joueurs) pouvaient s'affronter avec le pilote de tête choisissant le chemin à chaque point de contrôle. Pour s'adapter à l'augmentation le trafic des joueurs, le nombre de véhicules a été réduit par rapport aux jeux précédents. « OutRunners » s'avère être très beau, varié et assez impressionnant, avec ses arrière-plans détaillés vous faisant voyager dans le monde entier (de l'Amérique à la Chine). La bande-son propose une réorchestration de la musique originale d' « Out Run » par Takenobu/Mitsuyoshi, ainsi que de tout nouveaux morceaux que vous pouviez changer pour la première fois durant le jeu. Avec tout cela, on aurait pu penser que le succès du jeu aurait été là, mais « OutRunners » est un échec ! les dérappages sont râtés et le jeu doit surtout face à de nouveaux concepts révolutionnaire, cette fois en 3D et provenant d'un studio concurrent ? Pas du tout mais de chez Sega même, ceux à l'origine d'"Out Run" c'est à dire AM-2 avec leur spectaculaire "Virtua Racing", faisant entrer une fois de plus la course automobile dans une autre révolution celle de la 3D.
- « Out Run 2 » (2003). Il faudra attendre 2003 soit presque 17 ans après le jeu original pour qu' « Out Run » ait le droit à sa vraie suite officiel. Développé par Sega-AM2 (arcade) et Sumo Digital (Xbox). Graphiquement le jeu reprend les points forts du jeu original, la célèbre marque décapotable, les décors balnéaires, c'est beau et même très beau: ah j'oubliais et votre charmante partenaire féminine est bien sûr de la partie et vous lancera parfois des bisous pour vous féliciter. Malheureusement le jeu disponible sur Xbox 1 puis dans une version HD sur 360 n'est toujours pas retro compatible avec les nouvelles consoles et non disponible sur le store, SEGA ayant perdu la licence Ferrari ! Une version améliorée et avec des tracés différents « OutRun 2006: Coast 2 Coast » (2006) sortit en 2006 sur PlayStation 2, Xbox, PSP et PC, elle aussi non retro compatible évidemment :sniff !!
Yu Suzuki a toujours eu la chance d'avoir une vision claire de ce qu'il voulait, même si, comme dans le cas de la saga Shenmue, il n'a pas toujours réussi à l'obtenir. Mais avec Out Run, la vision de Suzuki a été réalisée aussi parfaitement qu'on aurait pu l'espérer, laissant aux joueurs et à son concepteur et programmeur une expérience satisfaisante mélange de rouge métal, de ciels pastel et d'accélération vers l'horizon. Le mot de la fin sera pour Yu Suzuki :
Le concept d'Out Run n'était pas de rouler frénétiquement pour prendre la première place. Il s'agissait d'abord de se promener avec une belle femme assise à vos côtés et de conduire dans une voiture de luxe, une seule main sur le volant, finissant premier loin devant - et avec du temps devant vous.
Yu Suzuki, SEGA Lead Project