Pour de nombreux joueurs, « Dungeon Master » c'est le souvenir de longues heures et parfois de longues nuits blanches passées à errer dans des couloirs sombres, avançant pas à pas avec prudence, près à sursauter à chaque recoin de souterrains infestés de momies, de rats géants, de golem de pierre ou de monstres en tout genre, s'essayant à composer quelques sorts à partir d'obscures runes écrites sur un vieux parchemin trouvé au plus profond d'un couloir reculé. Jamais auparavant un jeu vidéo n'avait autant plongé les joueurs dans un univers aussi vivant et menaçant. Jamais une machine n'avait autant marqué le pas sur la génération précédente, et quelle machine ! l'Atari ST. Le CRPG (Computer Role-Playing Game) temps réel sauce FTL était né, marquant durablement toute une génération, devenant la référence en terme de Dungeon Crawler, le maître étalon sur lequel tout autre jeu qui s'y frotterait serait, malgré ses qualités intrinsèques, relégué au rang de clone ou tout simplement qualifié de Dungeon Master like. C'est l'histoire de la construction d'un CRPG hors du commun...
Le joueur incarne Theron, un apprenti sorcier servant le puissant magicien Grey Lord. Alors qu'il tente d'invoquer une Power Gem, le magicien se trompe de formule magique et provoque une rupture du temps et de l'espace. Les effluves magiques scindent alors l'âme de Grey Lord en deux parties antagonistes, Lord Librasulus, le côté bon et sa contrepartie démoniaque Lord Chaos qui se terre alors dans un donjon composait de quatorze niveaux. De son côté, Theron est réduit à l'état de fantôme et son objectif est de retrouver la seule arme capable de réunir les deux parties de l'âme du sorcier - le Firestaff - c'est à dire le bâton de feu que Lord Chaos a caché dans les recoins les plus profonds de son donjon. Pour mener à bien la mission, Theron doit choisir dans le Hall of Champions quatre personnages parmis vingt-quatre champions emprisonnés dans des miroirs par Lord Chaos, devenant ainsi les seuls espoirs pour retrouver le Firestaff.
Chaque machine a son jeu phare, celui qui l'identifie immédiatement, qui la caractérise, qui parle tout de suite au joueur, et dont la simple évocation suffit à elle-même à engendrer toutes sortes de souvenirs, parfois de nostalgie. Et parmi le nombre incalculable de jeux sortis sur Atari ST, celui qui l' identifie à coup sûr, c'est bien « Dungeon Master ».
Sortie pour les fêtes de Noël 1987 « Dungeon Master » sonne comme un coup de tonnerre dans le paysage vidéoludique de l'époque, si bien qu'on peut dire qu'il y a eu un avant et un après « Dungeon Master ». A l'origine le jeu a été développé sur Atari ST mais succès oblige il fut traduit en français, allemand, japonais et convertit sur un peu toutes les plateforme de l'époque : Amiga, PC, Apple II GS, X68000, PC-9801, le FM-Towns et même sur console Super Nintendo et PC Engine.
Si au départ la sortie du jeu est assez discrète du moins en Europe, en partie dû à une quasi-absence de publicité de l'éditeur Mirror Soft, le jeu rencontre rapidement son public grâce à un bouche à oreille terriblement efficace, créant alors très vite une sorte d'engouement, de phénomène culturelle, un emballement qui se traduit rapidement par des ruptures de stocks, plaçant le jeu de FTL en tête des ventes aux Etats-Unis et en Europe pendant des semaines. Un succès presque insolent mais mérité.
Mérité car « Dungeon Master » n' est pas qu' un simple Dungeon Crawler solide, efficace, immersif exploitant enfin les capacités de l'Atari ST c'est bien plus que cela. Pour tous les joueurs ayant touché de ses mains ce jeu sur ST c'est une expérience inoubliable, des souvenirs indélébiles, des heures et des journées entières passées dans les méandres des sombres couloirs à combattre des créatures qui nous faisaient sursautés, qui nous semblaient alors presque vivantes par rapport à ce qu'on avait l'habitude de voir jusqu'alors. Presque 35 ans après son aura reste intacte, et pouvoir à nouveau se déplacer dans ces donjons reste une expérience à elle seule, une plongé dans un jeu qui a révolutionné le jeu vidéo mais a aussi donné un sacré coup de vieux aux standards de l'époque.
Comme souvent construire un tel jeu n'est pas le fruit du hasard, bien souvent leurs concepteurs ont connu avant des échecs, des doutes, des problèmes financièrs, pour enfin réussir à fournir le bon jeu au bon moment. L'histoire de « Dungeon Master » semble intimement liée à la société américaine FTL qui a développé le jeu, et inversement pourrait-on dire, car la société n'a produit que peu de jeux dans sa courte existence. La conception de Dungeon Master a été un processus long, réfléchi, couteux et ce n'est pas le fruit d'une seule personne mais un travail d'équipe qui a abouti à ce produit fini, un Dungeon Crawler pas comme les autres:
La question n'est pas dénué d'intérêt, même pour les initiés, définir ce qui caractérise un Dungeon Crawler relève parfois de discussions passionnées, voir pour certains d'hérésie, c'est pourtant loin d'être aussi évident mais nécessaire pour revenir aux sources de la construction du jeu en lui-même. Initialement, le Dungeon Crawler (ou Dungeon-RPG) se réfère à une transposition en jeux vidéo des jeux de rôle plateaux de type Donjons et Dragons et plus particulièrement la partie exploration de donjons, c'est donc en quelque sorte un sous-genre des jeux de rôle. L'action elle se situe dans un univers médiéval-fantastique dans lequel des personnages explorent en vue subjective case par case un environnement de type labyrinthique (donjon/dungeon), combattant des monstres, qui leur font gagner de l'expérience (level-up), parfois des équipements (stuff) et s'emparant des trésors qui se trouvent sur leur chemin. Mais halte là ! il n'y a pas de définition simple et basique pour tenter de définir un Dungeon Crawler et chacun pourrait voir dans tel jeu ou tel autre un Dungeon Crawler ou non.
En raison de sa simplicité, le Dungeon Crawler est plus emprunt à l'action déjà par sa vue subjective, impliquant une immersion immédiate avec des combats de type « hack and slash » plus appréciés par les joueurs, et indirectement mettant un peu plus de côté la part stratégique du jeu mais ne l'écartant pas non plus complétement.
Certains parleront même de « l'essence même de l'expérience du donjon : Tuez les monstres, volez le trésor, et ... poignardez votre ami ».
Gary GYGAX (1938-2008), le père des jeux de rôle sur table « Donjons & Dragons », explique dans une interview parue dans la revue américaine « Dungeon » #112 de juillet 2004, que la première exploration de donjon faisait partie d'un wargame dans lequel les aventuriers pénétraient dans un château ennemi par un ancien tunnel d'évacuation creusé dans le donjon d'une forteresse. Le groupe s'est tellement amusé avec ce scénario qu'il l'a répété maintes fois avec des donjons de plus en plus complexes jusqu'à ce que l'aspect wargame du jeu soit abandonné au profit de l'exploration de donjon.
Pour les jeux vidéo, le genre apparaît à la fin des années 70 sur Apple II mais comme pour les jeux de plateaux connait un essor dans les années 1980 avec des jeux comme « The Bard's Tale », « Might & Magic » et bien sûr « Dungeon Master ». Ces jeux sont les premiers à proposer l'utilisation de la vue subjective. Les déplacements se déroulent alors case par case, pas de 3D temps réels à l'époque étant donné la faible puissance des micro-ordinateurs de l'époque. La deuxième vague apparaît dans les années 1990 avec des titres comme « Eye of the Beholder », « Anvil of Dawn » et « Lands of Lore » proposant alors des combats en temps réel ainsi que des graphismes améliorés en 3D avant que le genre tombe peu à peu en désuétude.
Tout commence au début des années 80, les jeux de rôle sur table « Donjons et Dragons » (en anglais « Dungeons & Dragons » ou plus communément « D&D ») déferlent alors sur les Etats-Unis et deviennent un véritable phénomène de mode qui passionnent des millions d'américains.
Ce succès des jeux « D&D » réside dans leur conception assez libres autorisant de nombreuses formes d'interprétation possibles d'une partie ; avec seulement quelques objets - des dés, des feuilles, des crayons, des cartes, des figurines miniatures, un livre de règles - les joueurs sont plongés dans un monde fantastique qui ne prend forme que dans l'esprit de chacun. Un joueur, le maître du donjon, est chargé d'interpréter les règles et de décrire le déroulement de l'aventure, les autres joueurs incarnant des personnages d'heroic fantasy aussi diverses que des barbares, elfes, nains et mages: luttant pour leur survie dans un monde imaginaire de sorcellerie et de monstres, ouvrant ainsi des possibilités presque infinies.
Le cinéma et la télévision américaine fleurteront plus discrètement sur ce phénomène de mode, comme dans le film « E.T ». Ils font dire que ce nouveau loisir divise, et est bien souvent décrié, jugé négativement, voir même pour certains dangereux. En 1982 Tom HANKS jouera son premier rôle dans « Mazes and Monsters » (Les Monstres du Labyrinthe en vf), un drame, parfait reflet des peurs et interrogations de la société face à nouveaux loisirs des adolescents et des dangers à jouer aux jeux de type D&D: rien que ça !
En France le phénomène est plus discret mais pas inexistant, il sera par contre presque totalement ignoré par l'ensemble des médias, à quelques rares exceptions près. En 1986 l'émission de jeunesse Récré A2 diffuse un dessins animés U.S des studios Marvel « Dungeons & Dragons » renommé pour l'occasion « Le Sourire du Dragon ». L'histoire d'un groupe de six adolescents qui se retrouve coincé dans un univers heroic fantasy après avoir participé à une attraction de fête foraine. La série comportera 27 épisodes mais, sans doute faute d'une mauvaise audience, n'a jamais connu de véritable fin, quant au début de la série, il semble être directement introduit par le générique.
Outre-Atlantique, la firme qui a bien l'attention à ne pas laisser passer le train, c'est Mattel Electronics. En 1980, le fabriquant américain édite « Dungeons & Dragons - Le labyrinthe électronique ». Le jeu se présente sous la forme d'un plateau en plastique gris foncé représentant un château avec ses quatre tours. Une puce sonore émet quelques sons pour mettre le joueur dans l'ambiance. Le plateau est divisé en une soixantaine de case représentant les situations rencontrées. Le joueur commence avec un capital de point de déplacement qu'il consomme jusqu'à épuisement. Le but du jeu évidemment trouver le trésor et éviter de croiser le chemin du dragon.
Histoire de bien enfoncer le clou et être sûr de toucher les plus jeunes, Mattel Electronics profite de l'explosion des ventes de ces nouveaux petits jeux électroniques à cristaux liquides, les Game & Watch inventé par Nintendo. En 1981 une version dédiée à la licence et nommée « Dungeons & Dragons - Computer Fantasy Game» est éditée mais à ma connaissance n'arrivera jamais en Europe, sans doute faute d'un public suffisant.
Les jeux vidéo se sont eux toujours inscrit dans une prolongation naturelle des jeux de plateaux. Dans les premiers jeux de rôle textuels on était d'ailleurs assez proche de ce que pouvait proposer un jeu de plateau. Par la suite avec l'apparition de graphismes plus évolués, l'imaginaire de chacun est relégué au second plan mais le changement le plus important dans les jeux vidéo étant qu'un seul joueur pouvait incarner plusieurs personnages à la fois, l'aspect coopératif en l'absence de toute possibilité en réseaux à l'époque, disparaissait alors au profit de jeu plus individualiste à contrario des jeux de plateaux.
Jusqu'au milieu des années 1980, les jeux de rôle sur ordinateur étaient généralement ignorés par la masse des joueurs, ils étaient destiné plutôt à un public averti, certains diront élitiste. La plupart étaient uniquement en anglais, et étaient considérés souvent et à juste titre comme lents et ennuyeux. Les fans du genre devaient souvent se contenter de RPG au tour par tour dotés de graphismes et de sons minimalistes, avec des actions et des déplacements qu'il fallait saisir manuellement via une succession de commandes qui finissait par nuire au plaisir de jeu.
Parmi les jeux de rôle qui ont aidé à l'essor du phénomène RPG sur 8 bits on peut en citer notamment trois jeux fondateurs dans les bases du CRPG (Computer-RPG) traditionnels : « Akalabeth », « Ultima » et bien sûr « Wizardy ».
En 1979, alors qu'il était encore adolescent Richard GARRIOTT, déjà connu sous le nom de « Lord British » et futur créateur de la série des Ultima, programme le jeu « Akalabeth: World of Doom » sur Apple II. Tombé un peu dans l'oubli depuis face à son successeur, le jeu est largement inspiré de Donjons & Dragons et de l'oeuvre de Tolkien. « Akalabeth » est un jeu de rôle au sens large du terme mais adopte dans sa partie exploration de souterrains, une représentation en vue subjective en 3D fil de fer précurseur des Dungeons Crawler. Considéré comme le premier jeu de rôle graphique, ancêtre des Ultima, parfois appelé Ultima 0.
On y trouve déjà quelques concepts clés des CRPG : créations des personnages (guerrier ou mage uniquement) les caractéristiques des personnages sont eux choisi au hasard, choix d'un équipement basique, explorations de souterrains (dungeons en anglais). Pour l'époque le jeu est assez innovant, déplacements à l'extérieur en vue aérienne, exploration des souterrains en vue subjectif en 3D fil de fer. Plutôt convaincants au regard des capacités de la machine. La difficulté étant de réussir à gérer ses provisions et préserver sa santé.
On peut dire que d' « Akalabeth », « Dungeon Master » en tire son essence.
Sorti en 1981 sur Apple II, « Wizardry : Proving Grounds of the Mad Overlord » (« Sorcellerie : Le Donjon du Suzerain hérétique » en Français) est peut-être et surement le jeu le plus célèbre de cette époque. Edité par Sir-Tech, il est considéré par beaucoup comme le jeu fondateur du CRPG, posant ainsi les concepts clés des jeux de rôle D&D qui évolueront d'ailleurs assez peu par la suite, technique mise à part. Créé par deux étudiants américains Andrew GREENBERD et Robert WOODHEAD avec comme but de retranscrire en jeux informatique le plus fidèlement possible une partie de « Donjons & Dragons ».
Ainsi l'aventure commence par la constitution d'une équipe de six personnages créés parmi cinq races (humains, nains, elfes, hobbits et gnomes), quatre classes (guerrier, magicien, prêtre ou voleur), des classes « avancées » et plus inhabituelles (ninja, samouraï, seigneur, évêque) avec leurs caractéristiques et leur morale (bon, mauvais, neutre) et qui ont une influence sur le jeu.
L'écran affiche en permanence les touches de directions (attention uniquement au clavier, on est en 1981), les personnages et leurs caractéristiques, les informations sur le lieu (objets:) ou les rencontres (monstres...). La vue de déplacement se fait via une toute petite fenêtre représentant l'univers du jeu. Les couloirs sont tracés en 3D fils de fer, la rencontre avec un monstre donne lieu à la disparition du labyrinthe et à une image du monstre. La montée en compétence suivant l'expérience acquise est aussi une composante importante du jeu. Le jeu sera adapté trois ans plus tard en 1984 sur PC avant de ressortir dans une version dite « enhanced » en 1987 dans une compilation réunissant les trois premiers « Wizardry ».
La partie stratégique : composition de son équipe (caractéristiques, races, classes...) et leur montée en compétence dans « Dungeon Master » doivent beaucoup à « Wizardry »
Ultima I a été un grand succès et Richard GARRIOTT est devenu rapidement une des premières star du jeux-vidéo et en l'occurrence des RPG sur micro-ordinateur. « Ultima II : The Revenge of the Enchantress » est lui sorti en 1982 d'abord sur Apple II, c'est le dernier jeu produit par Richard GARRIOTT pour Sierra on-line avant qu'il ne fonde sa propre société Origin Systems. Proposant de vastes contrées à explorer, vous pouvez non seulement visiter la Terre à différentes époques, mais aussi voyager sur des planètes lointaines, jamais le mot exploration n'avait autant pris sens que dans « Ultima II ».
Attributs du personnage, gestion de la nourriture, de la santé, de l'argent, achat d'arme et de nourriture, le jeu est complexe (trop ?) avec au final un constat... merde l'argent ça part vite et tout coûte cher dans ce foutu « Ultima », si bien qu'on se retrouve souvent à cours d'argent dans ce jeu. Même si Ultima II ne révolutionne pas pour autant le jeu de rôle que ces prédécesseurs, il devient vite une référence et se vend à plus de 100 000 exemplaires, faisant de lui le jeu le plus vendu de cette époque et l'un des plus populaires puisqu'encore au début des années 90 il restait encore une référence en CRPG.
Le jeu introduit aussi pour la première fois la notion de goodies qui sera reprise dans tous les épisodes suivants : Livret, carte en tissu, etc.. le tout dans une belle boite, un luxe pour l'époque et un objet de collection très prise de nos jours.
Enfin impossible de ne pas évoquer des jeux comme la trilogie « Bard's Tales » (obligeant d'avoir un barde dans son équipe d'où le titre) créé par Michael CRANFORD dont le premier jeu apparait en 1985 et la série des « Might and Magic » de Jon Van CANEGHEM en 1986 encore sur Apple II introduisant enfin des paysages extérieurs en vue subjective, et pas uniquement des donjons longs et poussiéreux, décidément cette machine a été la faiseuse de RPG anthologiques.
Si je vous parle de tous ces jeux c'est que la création de « Dungeon Master » emprunte beaucoup à ses précurseurs du jeu de rôle, on peut dire que sans eux il n'y aurait pas de « DM » ou du moins pas comme on le connait. Si l'essence du jeu de rôle reste la même, la différence se joue pour « DM » dans la mécanique de jeu et le bon en avant en terme de capacités graphiques, sonores et puissance de calculs que permettait l'Atari ST.
Revenons à la naissance de « Dungeon Master ». Lorsqu'il se rencontre Doug BELL et Andy JAROS sont deux étudiants à l'Université de Chimie de Californie. Comme des milliers d'autres jeunes à ce époque, les deux amis se passionnent pour les jeux de rôle sur table de type « Donjons et Dragons » mais aussi à leur version jeu vidéo (CRPG).
En 1981, j'ai obtenu mon diplôme en chimie à l'Université de Californie à Irvine. Je travaillais comme contrôleur qualité en chimie pour la société 3M depuis près de deux ans à l'époque. Cependant, la perspective d'une vie entière étiquetant des produits chimiques cancérigènes pour un salaire qui n'augmenterait qu'une fois par an n'était pas l'idée que je me faisais d'un travail enrichissant.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Faisant l'acquisition d'un Apple II, les deux amis se lancent dans des parties interminables d'abord d' « Ultima » et plus tard de « Wizardry - Proving Grounds of the Mad Overlord» (« Sorcellerie I - Le Donjon du Suzerain hérétique » en version française).
C'est au cours de ces gigantesques sessions de jeu que BELL réalise sa véritable vocation et pense pouvoir créer un jeu de rôle aussi bon voir meilleur qu'« Ultima II » ou « Wizardry ». Avec cet objectif en tête, et bien que les deux amis chimistes n'ont aucune expérience dans le jeu vidéo, ils décident de se lancer et de fonder leur propre studio de développement appelé "PVC Dragon", réussissant même à attirer quelques investisseurs en vendant quelques actions à des amis proches ou à leurs familles. La répartition des tâches sera ainsi : BELL sera le programmeur et JAROS le graphiste.
Je venais de voir le jeu « Ultima » pour Apple II. Mon ami Doug BELL et moi étions intrigués. Nous savions que les créateurs de certains des premiers jeux Apple se portaient bien financièrement. Doug et moi avons estimé que nous pouvions améliorer le concept, nous avons donc intéressé des investisseurs et créé une entreprise. J'ai quitté mon emploi chez 3M et je me suis consacré à plein temps au projet.
J'avais appris l'assembleur et le Pascal à partir de zéro pour son développement. Cependant, Doug avait un vrai talent en programmation, alors je suis devenu le graphiste du projet. Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Imitant Robert WOODHEAD, le programmeur de « Wizardry », Doug BELL commence la programmation sur Apple II en Pascal. Leur jeu s'appelle dans un premier temps « Crystal Dragon ». Ils y travaillent avec acharnement jusqu'en 1983. Mais les ambitions du duo sont de plus en plus grandes et l'argent commence par manquer.
Mon intention initiale pour entrer réellement dans le monde informatique était de terminer « Ultima » et d'en voir plus. « Wizardry » allait bientôt suivre et a absorbé de nombreuses heures que nous aurions dû passer à travailler sur notre premier programme, « Crystal Dragon ».
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Ils finissent par conclure qu'ils ne pourraient pas faire leur jeu tout seuls et se lancent dans la recherche d'un éditeur qui pourrait apporter les fonds nécessaires. Après quelques refus, ils sont mis en contact avec FTL qui semble intéresser par leur projet.
Après quatre ans à essayer de continuer à travailler sur le projet, et toujours à court d'argent, nous avons envoyé six lettres à certaines sociétés de logiciels dans les régions de Los Angeles et de San Diego. L'un d'eux nous a mis en contact avec Wayne HOLDER de FTL Games. Le reste, comme on dit, appartient à l'histoire.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
J'avais presque abandonné le business du jeu vidéo auparavant -- en fait j'avais abandonné -- mais j'avais toujours l'idée au fond de moi que j'aimais faire des jeux. Mais, Un jour, Andy et Doug BELL sont entrés dans mon bureau et ils ont eu cette idée de jeu. J'avais déjà produit « Sundog » pour l'Apple II et cela n'avait pas été un énorme succès -- surtout je crois parce qu'il y avait trop de produits et que je n'avais pas l'argent pour promouvoir le produit efficacement. Coïncidence avec cela, j'étais allé au salon CES qui était en janvier 1985, j'ai vu la machine Atari et j'en ai été vraiment impressionné - surtout avec le prix auquel ils prétendaient pouvoir le vendre.
Wayne HOLDER, fondateur de FTL
FTL Games « Faster Than Light » était la division jeux vidéo de Software Heaven Inc fondée en 1982 par Wayne HOLDER. Basé à San Diego, la société mère construit sa notoriété grâce à un logiciel d'aide à l'écriture, une sorte de correcteur orthographique, vendu sous licence son moteur équipera des traitements de texte célèbres comme « Word » sur CP/M (un ancêtre du MS-DOS) puis « Word Plus 1.0 ».
La direction de cette filiale est assurée par un ancien copain de fac de Wayne, amateur lui aussi de jeux vidéo, Bruce WEBSTER. Ce dernier avait déjà une expérience dans le jeu, ayant écrit des articles pour diverses magazines de jeux américains, dont Computer Gaming World. Il était également un joueur de jeu de plateau et un passionné de RPG, il semblait donc être un choix judicieux pour aider à la mise en place de cette division jeux vidéo. Ensemble, Wayne et Bruce conçoivent le premier jeu de FTL, « SunDog: Frozen Legacy » sur Apple II. Bruce s'occupe en grande partie du codage. Inspiré par sa foi mormone, le jeu raconte l'histoire d'un petit groupe de colons de l'espace à la dérive sur la frontière galactique, que vous, pilote d'un petit cargo, où vous devez secourir des colons en échangeant des biens dont ils ont besoin pour survivre et se développer. Sorti en mars 1984 sur Apple II, le jeu ne rencontre malheureusement pas le succès escompté.
Complétement épuisé par cette expérience, Bruce qui avait pris en charge tout seul 80 à 90% de la programmation du jeu est incapable de faire face à la perspective d'un autre projet de ce type, il quitte FTL à l'automne, peu de temps après avoir terminé une version 2.0 de « SunDog » qui corrigeait quelques bugs et y ajoutait de nouvelles fonctionnalités.
Par la suite Bruce WEBSTER n'a pas touché à la programmation informatique pendant plus de quatre ans. Cependant, il a continué en enseignant l'informatique à l'Université Brigham Young et en écrivant des articles pour des magazines comme BYTE et Macworld. Bruce est ensuite devenu un contributeur au Computer Dictionary, publié par Microsoft Press au début des années 1990.
Au moment où la version 2.0 a été terminée, j'étais épuisé par le développement de logiciels. J'ai démissionné une semaine plus tard et, malgré des offres intéressantes d'autres sociétés de conception de jeux, je n'ai pas pu travailler comme ingénieur logiciel pendant près de quatre ans. Heureusement, j'ai pu écrire à plein temps et enseigner l'informatique dans une grande université entre-temps.
Bruce WEBSTER, programmeur de SunDog sur Apple II
L'échec du jeu et le départ soudain de Bruce remettent en question la stratégie et l'existence même de FTL. Pendant ce temps, l'activité logiciel bureautique d'aide à l'écriture devient de plus en plus difficile, et fastidieuse, de plus en plus dominée par de grands noms comme Microsoft, Ashton-Tate et Lotus, avec des budgets marketing à leur hauteur ne laissant que quelques miettes aux autres.
Mais c'était sans compter sur le destin, souvent enclin à créer des opportunités et des rencontres parfois emprunt à engendrer de grands jeux.
Ainsi suite à leur rencontre avec Wayne HOLDER, Doug BELL et Andy JAROS intègrent l'équipe FTL Games en 1983. Le plan initial était de continuer et terminer « Crystal Dragon » toujours prévu sur Apple II et codé en Pascal. Le contrat entre les deux amis et FTL n'était au départ que... temporaire.
Wayne a décidé de nous embaucher pendant quelques mois pour que le jeu fonctionne
Doug BELL, programmeur de Dungeon Master
Le chantier sur « Crystal Dragon » s'est immédiatement avéré être un projet trop ambitieux, plus compliqué que ce que HOLDER avait prévu. BELL et JAROS avaient plein d'idées, mais toutes n'étaient tout simplement pas faisables sur Apple II, cela malgré l'acharnement avec laquelle les deux amis s'étaient lancés dans la réalisation de leur jeu, ils se sont retrouvés confrontés à un problème bien connu des développeurs trop ambitieux : le hardware.
Parallèlement la société américaine Atari est sur le point de sortir fin 1985 un nouveau micro-ordinateur, un 16 bits capable de rivaliser avec les produits japonais, basé sur un processeur Motorola 68000, l'Atari ST. L'ordinateur se veut être aussi être un concurrent direct du Macintosh d'Apple commercialisé l'année précédente. Pourtant assez rapidement c'est à l'Amiga qu'il se confronte, dont le brevet, un temps convoiter par Atari, tombe finalement chez son rival le constructeur Commodore. Une concurrence qui allait donner lieu à l'une des plus importantes batailles commerciales de la micro-informatique des années 80.
L'idée de FTL est de proposer un jeu au lancement du ST. Malheureusement, il n'y avait tout simplement pas assez de temps pour convertir tout le travail qu'avaient déjà fait Doug et Andy et de terminer le jeu pour le lancement de la nouvelle machine d'Atari.
Quand j'ai vu cette machine et que j'ai parlé à Andy et Doug, j'ai dit, eh bien, allons-y. Nous avons donc obtenu l'une des toutes premières machines de développement d'Atari vers mars 1985 environ avec pratiquement aucun logiciel. Nous avons simplement pris « Sundog » et l'avons converti au format de la machine, ce qui signifiait en fait mettre en place un système Pascal dessus en premier lieu. Ensuite, il convertissait tout le code et Andy faisait tous les graphiques à partir de zéro sur un IBM. Nous avons en fait développé le jeu sur un IBM et porté le tout sur un Atari ST.
Wayne HOLDER, fondateur de FTL
Convertir « Sundog » sur la nouvelle machine 16 bits d'Atari : Dans quelle mesure un même jeu qui a connu un succès restreint sur Apple II, avec des graphismes et des sons améliorés, une interface optimisée pour la souris, pourrait-il perçait sur le marché vierge du ST ? Voilà une inconnu qui, étant donné les investissements en jeu, ne doit être pris à la légère car cela pourrait être préjudiciable à la suite du développement de Crystal Dragon, voir même remettre en question l'existence même de la société.
Nous avons décidé qu'il était important d'avoir un jeu lors du lancement du ST, qui était prévu pour la fin de 1984. Wayne, Andy et moi avons décidé que de convertir SunDog serait un meilleur choix que d'essayer de développer un nouveau jeu pour cette nouvelle plate-forme.
Doug BELL, programmeur de Dungeon Master
Grâce aux efforts de chacun, l'équipe a rapidement upgradé l'aventure de science-fiction « SunDog » sur Atari ST.
Sorti juste à temps pour Noël 1985, SunDog « enhanced » sur 16 bits arrive sur le marché tout jeune du ST. Malgré le nombre plus restreint de clients potentiels qu'offrait le ST en comparaison avec l'Apple II, le jeu se vend très bien, et devient un classique, aidé en partie par l'absence quasi-total de logiciel sur cette machine.
Nous en avons vendu, vraiment, en très bon nombre. Pendant un certain temps, c'était à peu près la seule chose que vous pouviez acheter sur Atari.
Wayne HOLDER, fondateur de FTL Games
Janvier 1986, fort de leur expérience acquise sur la conversion ST de « SunDog », BELL et JAROS deviennent salariés à temps plein chez FTL et reprennent le développement de « Crystal Dragon » rebaptisé au passage en « Dungeon Master ».
« Dungeon Master » - étonnant que personne n'avait encore revendiqué un tel nom pour un jeu de rôle même pas chez l'éditeur SSI (Strategic Simulations Inc) qui s'occupait à l'époque des adaptations en jeux vidéo des franchises « Donjons et Dragons » de TSR - Si le nom semblait tout trouver, le processus de création demande lui un engagement supplémentaire en termes de programmation impliquant une réécrire de zéro du jeu pour tirer parti des capacités de l'Atari ST.
Grâce à la puissance du ST, l'équipe allait enfin pouvoir faire le jeu qu'il voulait, un CRPG capable de rivaliser et de dépasser le maître « Wizardry » sans être continuellement ramener aux limitations hardware de la machine.
L'Atari était un ordinateur beaucoup plus performant que l'Apple II, et mieux adapté à « Crystal Dragon », où nous passions beaucoup de temps à essayer de l'adapter au 64K d'Apple
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Pour concevoir « Dungeon Master », BELL et Wayne HOLDER pense qu'une approche plus intelligente, plus pérenne serait d'écrire d'abord un ensemble d'outils, cela inclut un compilateur capable de convertir le jeu sur différentes plateformes, avec comme idée que ces mêmes outils pourraient resservir plus tard pour créer d'autres jeux et leurs conversions.
Nous savions qu'il n'y avait absolument aucune chance de récupérer notre argent avec une seule version de Dungeon Master. Nous devions mettre en place une stratégie qui servirait de base pour les jeux ultérieurs.
Wayne HOLDER, Fondateur de FTL
Pour les aider dans cette tâche titanesque, un nouveau programmeur, Mike NEWTON, est embauché pour travailler sur ces outils de conception. L'une des applications les plus significative est « Dungeon Construction Set » (DCS) qui permet de concevoir de A à Z un niveau complet du dongeon simplement à partir d'une interface graphique unifiée.
Je pense qu'une partie de l'inspiration n'était pas le matériel source ou le thème du jeu, mais la disponibilité soudaine d'équipements que tout le monde pouvait posséder et qui avaient une capacité graphique vraiment cool.
Mike NEWTON, Programmeur de Dungeon Master
En 1986 ce type d'approche était assez inédit et un petit exploit à part entière de créer ce type d'outil. Tout aussi impressionnante était la technologie de compression que FTL a dû développer à partir de zéro, ce qui leur a permis non seulement d'exécuter le jeu sur le modèle 512K du 520 ST c'est-à-dire le bas de gamme ST d'Atari, mais aussi de mettre l'ensemble du jeu sur une seule disquette simple face : code et graphismes compris, consommait moins de 400 Ko sur la disquette. En partie aider par le fait que le jeu n'utilisait que peu de texte à l'écran, contrairement aux autres jeux d'aventure qui eux étaient beaucoup plus gourmands en espace disque.
Nous nous sommes fixé un objectif élevé. Nous voulons devenir dans le domaine des jeux de rôle le pendant de ce qu'Infocom a réalisé dans le domaine des aventures textuelles. Par conséquent, nous avons passé plusieurs mois à peaufiner et à améliorer/détailler l'interaction pour « Dungeon Master ». Nous avons laissé des dizaines de personnes tester, des pros complets aux personnes qui n'avaient jamais vu d'ordinateur ni de donjon auparavant. Nous avons écouté chaque proposition et modifié l'interface utilisateur plusieurs fois.
Wayne HOLDER, Fondateur de FTL
Les premiers résultats sont assez encourageants et bientôt une démo de « Dungeon Master » codée en Pascal voit le jour. Pour BELL il s'agissait avant tout de tester la possibilité d'une grande vue en pseudo-3D à la première personne.
Nous avons commencé par un test utilisant un algorithme d'affichage (dessiner de l'arrière vers l'avant) pour créer le donjon. Nous voulions voir quelles seraient les performances, et c'était correct, mais nous avons réalisé que nous devions passer de Pascal à C. J'ai passé trois semaines à apprendre C et à réécrire le Dungeon Crawler en C, et les performances étaient meilleures que ce à quoi nous nous attendions.
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Finalement « Dungeon Master » sur Atari ST a été développé en Megamax C, le langage natif du système d'exploitation du ST avec une grande partie du code graphique en assembleur.
Plus la conception progressait, plus elle s'éloignait de son inspiration originel « Wizardry », et avec elle, des jeux de plateaux de type « donjons et dragons » . Au lieu d'avoir une classe définie, les personnages pouvaient progresser simultanément dans les quatre disciplines de combattant, sorcier, ninja et prêtre. L'expérience ne s'acquiert pas uniquement en tuant des monstres ou en accomplissant des objectifs, mais simplement en pratiquant les compétences dans chaque discipline et en s'améliorant ainsi. Le combat, qui se déroule désormais en temps réel, est une affaire beaucoup plus frénétique, mouvementée, dépendant autant des réflexes du joueur que des compétences acquises des personnages.
Si « Wizardry » est une adaptation des jeux « Donjons et Dragons » sur l'ordinateur, « Dungeon Master » est une réinvention complète qui ne prend qu'une poignée de concepts fondamentaux - un donjon à fouiller, des monstres à combattre, un trésor à collecter, des personnages à améliorer - comme sacro-saint. Tout le reste a été réinventer.
BELL accorde une grande importance sur le fait que si lui et JAROS étaient des aficionados inconditionnels de « Donjons et Dragons » et des précédents CRPG, le reste de l'équipe de FTL lui n'avait que peu ou pas d'expérience avec le genre et se demandait continuellement pourquoi le jeu qu'il était en train de concevoir devait respecter telle ou telle tradition plus ou moins arbitraire ; un tel questionnement constant a peut être sauvé le jeu de n'être qu'un simple clone d'un Xème jeu de rôle, et de n'être qu'une extension de ce qui avait déjà été fait. Et même si les racines de « Dungeon Master » proviennent des jeux de plateau, et des premiers CRPG, le jeu a trouvé sa propre voie et est même devenu le précurseur d'un nouveau genre, certain parle même plus d'un ancêtre de « Doom » que d'un successeur de « Wizardry ».
« Dungeon Master » a été présenté pour la première fois publiquement au Summer CES en juin 1986, pour lequel FTL a apporté une démo très limitée et non interactive qui montre principalement un scrolling vertical de texte, assez rébarbatif au passage et confus. Ce bref aperçu montre que, bien que le concept de base soit en place, une grande partie de ce qui a été fait doit encore être affinée, voir commencée. Par exemple l'interface dans cette démo est plus encombrée que dans le jeu final, le pointeur de la souris, sous forme d'une main, seul moyen d'interagir facilement avec les environnements et objet du jeux n'est tout simplement pas là. Un seul monstre est visible:la momie.
Le plan original de FTL est que le jeu soit disponible à temps pour Noël 1986. Mais ce plan tombe rapidement à l'eau et le jeu est finalement repoussé de plusieurs mois.
Au final, « Dungeon Master » a été développé en un peu plus de deux ans. Tout ce temps a été consacré à améliorer le produit constamment, ajouter des fonctionnalités, des énigmes, de nouveaux monstres.
Je travaillais sur ce système complexe où vous pouviez regarder le sol et capter des objets autour de vous, et Wayne dit : « Eh bien, c'est juste là, pourquoi ne puis-je pas simplement tendre la main et le ramasser ? » C'était une sorte de moment « bien, ouais". Et Wayne était en fait responsable de beaucoup de ces moments. Il venait juste et disait : « Pourquoi ne fais-tu pas ça comme ça ? »
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Les quatorze niveaux de donjons qui composent le jeu, dont la conception était un effort commun de toute l'équipe, ont été affinés de manière aussi obsessionnelle que la technologie et l'interface utilisateur. « Dungeon Master » a été testé constamment pendant des mois, d'abord par l'équipe elle-même et ses amis proches, puis, vers la fin du processus, à travers un test bêta extérieur sérieux, pour trouver un équilibre difficile entre plaisir de jeu et frustration.
L'idée depuis le début était que le jeu propose une expérience en temps réel, lui donnant une personnalité très différente du défi stratégique qu'était « Wizardry ». La minuscule fenêtre de « Wizardry » lors de l'exploration des donjons serait agrandit de manière à remplir au moins la moitié de l'écran. Le joueur ne serait plus isolé de l'environnement ; elle pourrait cliquer directement sur cet univers pour interagir avec les choses - et les créatures - qu'elle contient. Ces nouvelles idées, et bien d'autres qui continueraient à en découler pendant des mois à venir, faisaient partie d'une détermination globale à créer une expérience CRPG incarnée .
Dungeon Master n'a rien à voir avec Tolkien, du moins pas directement. Il y a quelques influences avec D&D qui sont venues d'Andy JAROS, le graphiste. Andy était le seul de l'équipe de développement à avoir joué à D&D et au moins le concept de Wizard's Eye (la créature aux yeux flottants) et du Shrieker ont été empruntés à D&D. Les classes de personnages (combattant, sorcier, prêtre, ninja) ont également été calquées sur D&D.
Il y avait probablement d'autres influences subtiles, mais vraiment pas autant qu'on le perçoit probablement. Ce que nous avons pris directement de « D&D », c'est le nom « Dungeon Master » après avoir réalisé que TSR n'avait jamais déposé de copyright ou de marque déposée sur le terme. C'était une tentative certes opportuniste d'obtenir une certaine reconnaissance avec ce nom, bien que pendant un certain temps au moins, le terme « Dungeon Master » était plus connu à cause du jeu vidéo qu'à cause de « D&D ».
En passant, FTL a eu de brèves discussions avec TSR pour que TSR commercialise le jeu. Au cours de ces discussions, nous avons montré une version préliminaire de « Dungeon Master » à TSR, donc TSR a eu l'occasion de s'opposer au nom et ne l'a pas fait.
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Un peu trop optimiste, le jeu est prévu dans un premier temps pour sortir durant les fêtes de Noël 1986, pour être repoussé de plusieurs mois et ne sortir qu'en décembre 1987.
L'équipe de développement derrière « Dungeon Master » était minuscule.
Nous n'étions pratiquement que cinq. Wayne n'a fait qu'une petite partie de la programmation - sa plus grande contribution a été de comprendre comment faire du son numérisé sur la puce sonore de l'Atari. Andy JAROS a réalisé les graphismes. Mike NEWTON a créé les outils, dont le DCS (Dungeon Construction Set). Dennis WALKER et moi avons réalisé 90 % de la programmation du jeu.
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Les jeux à ce moment-là étaient tous au tour par tour et vous pouviez prendre aussi longtemps que vous le vouliez pour réfléchir à ce que vous alliez faire ensuite. Nous savions que nous voulions mettre le joueur sous la pression du temps.
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Le moteur du jeu a été créé par BELL et une nouvelle recrue, Dennis WALKER, tandis que JAROS a fait mis ses talents d'artiste sur les graphismes, dessinant ses images sur ST essentiellement à l'aide de Paintworks d'Activision. Wayne HOLDER, a supervisé l'ensemble mais a également apporté sa contribution sur l'aspect sonore du jeu, afin de tirer la meilleure partie de la puce sonore, mais aux capacités limitées, de la machine.
Je pense que certaines des plus grandes contributions conceptuelles ont été apportées par Wayne, en particulier en ce qui concerne l'interface utilisateur.
Doug BELL, Programmeur de Dungeon Master
Nous avons essayé de le rendre effrayant afin que le joueur puisse se sentir engagé. Nous avons essayé avec des bruits de fond et toutes sortes d'autres choses pour le rendre effrayant. Offrir plus d'histoire aurait été aller à l'encontre d'une des philosophies directrices du jeu.
Wayne HOLDER, Fondateur de FTL
Peut être le plus influencé des deux amis par l'univers « Donjon & Dragons », Andy JAROS est l'artiste à qui l'ont doit les légions de montres effrayants qui errent dans les profondeurs de « Dungeon Master ».
Mon art était essentiellement autodidacte, même si j'avais dessiné pendant un certain temps avant de m'essayer à l'art informatique. J'ai admiré et étudié les oeuvres de nombreux artistes de la fantasy classique. Mes favoris incluent Escher, Frazetta, Boris, Dean, Mead, Corben, Woodroffe, les Hildebrants, Rowena, Segrelles et Rodney Mathews pour ne citer qu'eux.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Si certains ne juraient que par « Degas Elite » ou « NEOchrome », Andy designe les montres sur d'autres outils plus méconnus en Europe.
La version originale de « Dungeon Master » a été programmée sur l'Atari St. Il y avait plusieurs programmes de dessins disponibles à l'époque, mais j'ai opté pour Ti-Vision (plus tard Paintworks by Activision) parce qu'il avait la capacité pour donner les coordonnées de l'écran. Il disposait également d'un outil très pratique qui pouvait changer une couleur en une autre (ou les échanger) dans une zone définie par l'utilisateur. Cela a été utile pour trouver les combinaisons de couleurs les plus esthétiques dans le donjon, les menus et les écrans d'inventaire.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Pour la conception et l'inspiration des montres, ses inpirations sont diverses :
Je crois que c'est une aide efficace pour le joueur s'il peut réagir correctement face à un monstre dès qu'il le voit. Un monstre reconnaissable donne au joueur des informations sur ses force et faiblesses et peut les aider à développer une stratégie pour y faire face. Environ la moitié des monstres en « DM » sont clairement dérivés. L'autre moitié des créatures est ma création. Ce sont des mélanges tirés de très nombreuses sources, en particulier de vrais animaux. J'ai tendance à m'en tenir aux monstres de type animal car le niveau de réalité peut être maintenu très élevé.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
Le jeu engendre un stress constant non seulement par les combats avec les différents montres mais également par la gestion des sauvegardes qui sont manuels et si le joueur n'y prend pas garde, il pourrait perdre des heures de jeux :
Lorsque leurs meilleures armes s'évaporent pendant la contre-attaque, il y a un choc et des pensées paniquées sur le temps écoulé depuis la dernière fois qu'ils ont sauvé la partie. Enfin, il y a des larmes quand ils réalisent qu'ils n'ont pas sauvegardé de toute la soirée. Je crois que c'est la marque d'un jeu exceptionnel qu'il est si facile d'oublier de sauvegarder. Maintenant, je ne suis pas un sadique et je n'éprouve aucun plaisir à faire pleurer les gens, mais si « Dungeon Master » enseigne quelque chose, c'est la valeur des sauvegardes fréquentes.
Andy JAROS, Graphiste de Dungeon Master
L'affiche de « Dungeon Master » est l'une des plus connues et l'une des plus emblématique sur Atari ST et même dans l'histoire du jeu vidéo.
Si certains artistes sont connus et reconnus pour avoir fait les illustrations de jeux célèbres dans les années 80, bien souvent les informations de conception derrière ces illustrations relèvent d'une quête des plus ardu, la plupart des manuels ne créditant bien souvent pas les illustrateurs. Et dans ce style de recherche, si l'artiste n'a pas signé son oeuvre ou que sa signature n'ait pas été masquée, parfois volontairement, par un bandeau publicitaire, cette recherche peut s'avérer être longue voir infructueuse.
Pour notre cas c'est un peu différent, en effet on connait l'artiste derrière la superbe illustration de « Dungeon Master » puisqu'il s'agit de David R. DARROW, dont FTL avait déjà fait appel à ses services pour son précédent jeu « SunDog ». C'est donc à nouveau lui qui se charge de celle de « Dungeon Master », malgré le fait qu'il n'ait jamais eu d'appétence particulière dans le domaine du jeu vidéo.
La première illustration que j'ai faite pour FTL Games était la couverture du jeu Sundog , et ce n'était qu'un coup de chance. Je suis descendu pour les rencontrer et nous nous sommes tout de suite bien entendu, j'ai esquissé quelques idées et ils ont aimé ça. J'étais donc celui qu'ils voulaient absolument appeler en ce qui concerne l'illustration de « Dungeon Master ».
Je n'étais pas exclusivement dans l'industrie du jeu vidéo, en fait pas du tout ; J'ai fait tout ce qui me tombait sous la main pour subvenir aux besoins de ma famille. Ce projet avait l'air amusant, car c'était un jeu vidéo et j'avais la vingtaine...
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Etant donné l'impact du titre dans le jeux vidéo et la représentation quasi fusionnelle entre cette illustration et le jeu en lui-même, la peinture originale a eu les honneurs d'être exposée au London Science Museum lors de l'exposition Game On qui s'est déroulée d'octobre 2006 à février 2007.
Le tableau en lui-même mesure 60cm de large par 80cm de haut. Le titre est tout simplement « Dungeon », pas de « Master » bien que sur la boite du jeu il soit bien présent. Ce genre de différence n'est pas un cas unique, on se souvient par exemple du jeu « Shadow Of The Beast », dont la boite du jeu fait mention de ce titre mais quand on lance le jeu c'est uniquement le titre « Beast » qui s'affiche.
J'ai peint la couverture environ quatre à cinq fois la taille de la boîte de vente au détail sur un panneau d'aggloméré (masonite) recouvert d'une couche de gesso. J'ai utilisé de l'acrylique liquitex aérographe et des crayons de couleur pour le rendu. Cela m'a pris environ trois semaines, car la technique était toute nouvelle pour moi et je m'étais mis une pression énorme. C'était de ma faute. FTL avait été pourtant très patient avec moi.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
La peinture de DARROW représente une scène du prologue décrit dans le manuel de Dungeon Master, un scénario écrit par l'écrivaine reconnue Nancy HOLDER, et qui a certainement dû échappé à la plupart des joueurs: qui jouait alors sur des versions pirates.
L'illustration décrit ainsi les dernières minutes des trois (voir quatre) combattants face au défi que le joueur est prêt à affronter dans le jeu et ayant pour finalité de vaincre l'antagoniste Lord Chaos. Les héros qui sont représentés sont : Halk le Barbare, Syra Enfant de la Nature, Alex Ander - et Nabi le Prophète étrangement réduit en un tas de crânes !
Pour la mise en image de cette scène, l'artiste ne fait pas appel à des figurants, bien trop cher mais esquisse des personnes de son entourage ou à disposition.
Au premier plan se trouve mon ex-femme, qui a dû tenir un candélabre très lourd pour les photos que j'ai prises à titre de référence. Le gars qui attrape la torche était le programmeur Andy JAROS, et le mec musclé en arrière-plan était un gars que j'ai trouvé dans un gymnase:
Je suis entré dans un centre de fitness et j'ai demandé à la réceptionniste s'il y avait un gars vraiment énorme là-bas qui, selon elle, aimerait poser pour des photos pour une «couverture de jeu vidéo avec des héros» et elle est allée chercher un type. Je l'ai payé pour qu'il vienne chez moi et pose pour les photos avec une ampoule fluorescente dans les mains en guise d'épée. Le costume de ma femme était en fait une robe de nuit modifiée, les outils de l'homme musclé ont été inventés et Andy JAROS avait apporté son propre costume. Oui, il possédait tout ça !
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Concernant ce choix artistique, David D. apporte une réponse simple qu'on comprend forcément sur les jeux des années 80 mais peut être encore plus sur les très anciens jeux.
J'ai regardé les graphismes qu'ils ont créés dans le jeu. C'étaient des sprites très emblématiques mais en basse résolution. Ils introduisaient en quelque sorte la 3D dans un jeu, mais pas de manière émouvante C'était des graphismes très simples... j'ai réalisé que le simple fait de montrer ces graphismes simples ne vendrait probablement pas le jeu autant que toute l'histoire, toute l'implication; le fantasme et l'imaginaire derrière.
Donc à partir de leurs sprites du jeu, j'ai étoffé les contours. Par exemple, la grille au sol était basée sur les éléments du jeu, les portes qui s'ouvraient, les manières secrètes d'ouvrir les portes - tout cela était basé sur les petits, minuscules graphiques qu'ils m'avaient été montrés.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
J'ai fait beaucoup de petits croquis pour eux, je ne me souviens plus combien - cinq ou dix au maximum - avec des perspectives différentes. Et c'était celui qui, selon moi, apportait en quelque sorte un style d'affiche de film et d'amener également les graphismes très simples qui étaient en fait dans le jeu.
Comme ils avaient la peinture à disposition environ neuf mois avant la sortie du jeu, elle a peut-être influencé l'histoire. Il serait tout à fait logique que, si elle n'avait pas encore écrit le synopsis, d'utiliser l'illustration et de donner l'impression que c'était un jeu bien pensé.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Je ne me souviens plus d'où j'ai trouvé le tas de crânes. Il me semble que j'y ai vu des crânes, ou je l'ai volé à quelque chose que Drew STRUZAN a fait dans ses créations pour la série d'affiches et de compositions des films d'Indiana Jones, parce qu'il avait des crânes assez cool dans son travail - et que j'essayais de donner à l'illustration une impression d'affiche de film.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Je n'ai jamais été un grand lecteur et je ne lis pas d'histoires fantastiques, donc cela ne m'intéressait pas autant que de créer l'illustration qui aiderait à vendre le jeu - et c'est l'une des raisons pour lesquelles la couverture est assez simpliste autre que le détail dans les taches et les morceaux de sol. La pièce est assez clairsemée, parce que je ne voulais pas la survendre, je voulais juste contribuer à l'imagination d'une personne.
Je ne savais même pas ce qu'était un jeu de rôle, ou quoi que ce soit de le genre jeux de donjon, avant de m'y mettre ; J'étais un peu l'étranger de toute la communauté.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
L'utilisation du graphiste Andy JAROS dans l'illustration semblait couler de source sans compter qu'il a fait économiser pas mal d'argent à David DARROW, évitant des frais annexes pour l'embauche d'acteurs et de costumes.
J'ai pensé qu'il serait amusant d'utiliser l'un des programmeurs du jeu ; Andy JAROS a participé à une partie de la programmation et au moins à la conception, et a travaillé pour l'entreprise à plein temps - il était très enthousiaste à l'idée d'en faire partie. Il était dans une sorte de jeu de rôle.
Mon souvenir est qu'il y avait une communauté de personnes avec qui il traînait et qui jouait à des jeu de rôle en réel de temps en temps. Je n'ai pas bien compris, mais il est arrivé avec tout ça et j'ai dit « C'est super ! Je n'ai même pas besoin d'aller te chercher un costume ». Cela m'a fait économiser de l'argent.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Et pour sa femme...
Demander à ma femme de m'aider, c'était juste une question d'opportunisme - elle avait une belle silhouette et de beaux cheveux longs, et une chemise de nuit que je pouvais transformer en quelque chose. Alors je lui ai juste demandé si elle pouvait le faire; elle a accepté - même si elle était enceinte de presque six mois de notre deuxième enfant à l'époque.
Ces photos ont été prises en août 1986 et mon fils est né en janvier. Il vient de se marier dimanche dernier, au fait, et il a 26 ans et demi. C'était il y a longtemps: p> David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Pour le barbare bodybuildé qui fait face à la porte qui s'ouvre, l'histoire est un peu plus rocambolesque comme il nous l'explique...
Je ne me souviens pas de ce que je lui ai donné, probablement environ 50 dollars pour venir chez moi et poser dans mon garage. Le plus dur a été de l'approcher au gymnase; lui disant ce que je voulais faire - que j'aimerais qu'il pose en sous-vêtements, parce que j'avais à peu près besoin de voir son corps. Et puis je lui ai expliqué que j'étais marié et que j'avais des enfants, et que c'était juste pour un jeu - honnêtement. [rires]
Il comprenait, mais c'était intéressant - c'était un gars très calme. Quand je lui ai dit ce que je voulais, il a simplement hoché la tête doucement comme s'il prenait en compte et pensait que c'était cool. Il travaillait évidemment son apparence physique, donc je suis sûr que cela le flatter que quelqu'un veuille l'utiliser comme modèle. Je pense que c'est le lendemain qu'il s'est présenté, et nous avons pris des photos pendant environ une heure et c'était fini.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
« Dungeon Master » s'est vendu à 40 000 exemplaires au cours de sa première année en 1987 seulement et fut le logiciel le plus vendu de tous les temps pour l'Atari ST, avec une pénétration du marché de plus de 40% sur toutes la gamme ST
Cependant, le contrat entre DARROW et FTL était un peu moins avantageux.
C'était un contrat verbal, nous l'avons juste confirmé. Cela a fini par être un peu plus que ce que j'avais demandé à l'origine - ce dont j'étais très heureux, pourrais-je ajouter. Je les ai appelés quelques années plus tard, je n'avais plus de contact avec eux parce que j'avais déménagé hors de la ville, et j'ai dit "Hé, je ne sais pas comment le jeu se porte - mais nous avions convenu que j'allais être payé en fonction d'une partie des ventes, tu te souviens ? » et Russ était le gars qui s'occupait des finances, et il a dit « Oh mon Dieu, tu as raison. Nous ne t'avons jamais fait de chèque ! Et plusieurs jours plus tard, j'ai reçu un très gros chèque dans mon courrier - ils avaient complètement oublié.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Comme indiqué plus haut, un mystère reste néanmoins sur le titre sur la peinture originale qui ne comporte pas bizarrement le mot "Master", ce à quoi David DARROW répond :
Le mot "Master" a été écrit à la main séparément et assemblé avec des techniques d'impression à l'ancienne. Je regrette en fait de ne pas l'avoir fait partie de l'affiche originale. Je ne me souviens plus pourquoi je ne l'ai pas fait.
David R. DARROW, illustrateur de Dungeon Master
Par la suite David DARROW a travaillé pour des studios hollywoodien, par exemple il a réalisé des affiches pour le film Terminator 2.
« Dungeon Master » s'est discrètement glissé dans les magasins américains le 15 décembre 1987, et quelques mois plus tard en 1988 en Europe, bien trop tard pour profiter du rush de Noël. La société ayant engloutie presque tous ses fonds propres pour développer le jeu, il n'a pratiquement pas eu de publicité dans les magazines de l'époque, si bien qu'il faudra attendre quelques semaines et le bouche à oreille pour que « Dungeon Master » gagne en popularité. Un succès presque soudain, à la limite de l'étonnement pour ses créateurs, tellement inattendu que rapidement le jeu est SOLD OUT et qu'il faudra attendre plusieurs semaines pour le retrouver en magasin - et cela seulement deux mois après sa sortie !
La société FTL fut submergé par les demandes, bataillant pendant des mois pour dupliquer et expédier les jeux aussi rapidement que possible car elle s'occupait elle-même d'en faire la duplication, allant même jusqu'à imprimer une pancarte pour les revendeurs de logiciels indiquant « Oui ! Nous avons Dungeon Master ! », qu'ils pouvaient accrocher pendant ces brèves périodes où c'était effectivement le cas.
La presse encense le jeu, même ceux qui n'ont pas d'affinité particulière avec le genre RPG, lui consacrant souvent de pleines pages de tests et au prix de la page c'était assez exceptionnel. La communauté ST se passionne vite pour ce jeu, d'abord en Amérique du Nord, assez tôt en Europe, où il a été packagé et distribué par l'éditeur britannique Mirrorsoft, appartenant au groupe d'édition anglaise Mirror Group Newspapers, propriété de Robert MAXWELL, disparu mystérieusement en mer en 1991 au large des îles Canaries et qui causera la faillite de Mirrorsoft. On estime que plus des deux tiers des ventes de « Dungeon Master » ont été réalisées via Mirrorsoft. FTL se chargeant des traductions en allemand et en français, ce qui était encore relativement rares dans l'industrie à l'époque.
La taille du jeu, les énigmes, son côté captivant, l'effervescence qu'il suscitait ont nourri les magazines, parfois des books dédiés, chacun y proposant sa solution, les plans des niveaux, ses astuces et bien sûr la liste des sorts...
Comme souvent à cette époque, la plupart des jeux étaient développés en priorité sur Atari ST et, si le succès était au rendez-vous, transposés quelques mois plus tard sur Amiga. Les raisons sont multiples mais somme toutes assez basiques, le prix du ST était très inférieur à celui de l'Amiga et avec un parc installé bien supérieur sur cette machine, sans compter que pour les développeurs le ST offrait une architecture plus rapide à maitriser, alors que l'Amiga nécessitait beaucoup plus de temps à maitriser notamment à causes des puces Agnus (gestion de la mémoire), Paula (l'audio) et Denise (affichage) .
Pendant quelques mois, « Dungeon Master » devient ainsi une exclusivité de la gamme ST. Une exclusivité qui a pris fin en 1988 non sans une contrainte douloureuse pour les possesseurs d'Amiga puisqu'il devenait le premier jeu à nécessiter 1Mo de mémoire vive alors qu'il tournait avec 512ko sur un simple Atari ST. La cause de tout cela était que le système d'exploitation était plus gourmand en mémoire sur la machine de Commodore, et FTL ne pouvait tout simplement pas faire fonctionner le jeu sur cet espace mémoire restreint. Cette décision a sans aucun doute nui aux ventes du jeu sur ce support, mais aussi d'un autre côté a pu influencer les Amigaïstes à investir dans une extension mémoire qui s'avèrera avec le temps vite rentable. Flairant la Belle opportunité, des revendeurs ont même proposé un bundle incluant extension de mémoire et « Dungeon Master ». Alors que les graphismes de « Dungeon Master » Amiga restent inchangés, FTL profite des capacités audios supérieur de l'Amiga pour améliorer l'expérience de jeu : bruits des monstres qui se déplacent à proximité de vous, etc: le tout en stéréo. Loin d'être un artifice, cet ajout sonore stéréo subtil était une véritable aubaine pour plonger encore plus le joueur dans l'environnement oppressant du jeu, faisant de « Dungeon Master » un des premiers grands jeux qui prend toute sa dimension avec un casque audio.
Une brèche avait été ouverte par FTL, emboitant le pas, quelques temps plus tard d'autres jeux souvent spécifiques à l'Amiga nécessitèrent 1mo. Les anglais de chez Teams 17 en ont fait un peu leur marque de fabrique avec des jeux superbes, aux graphismes très léchés mais aussi très gourmands en mémoire vive comme « Full Contact », « Alien Breed », « Superfrog », « Project X »:, les frenchies de chez Cryo avec l'expérimental « Dune », les belges de chez Art & Magic avec « Agony », les américains de Westwood Studio avec le RTS mythique « Dune II : Battle for Arrakis » ou encore Sensible Software avec son captivant et désopilant « Cannon Fodder ». Si bien qu'à un moment donné 1mo était le standard minium requis pour pouvoir bénéficier des jeux dit Amiga next-gen, pas de simples conversions issues de l'Atari ST comme on l'avait trop souvent vu au début mais des jeux 32 couleurs (voir 64 en mode half-brite), des sons digitalisés, des scrollings parallaxes utilisant enfin les capacités de l'Amiga.
Si le succès de « Dungeon Master » vient surtout de ses qualités intrinsèques longuement expliquées ci-dessus, lançant la mode des Dungeons Crawler, le fait que sa protection particulièrement efficace a tenu plus d'un an les groupes de hackers avant d'être complétement vaincue a sans aucun doute aussi participer à ce succès commercial, boostant du même coup les ventes des Atari ST et même des barrettes d'extension mémoire pour l'Amiga.
Pendant de nombreux mois des versions dites déplombées (ceux qui crackaient étant appelés à l'époque des déplombeurs) circulaient dans les réseaux pirates mais elles n'étaient en fait que partiellement nettoyées, bloquant le jeu à des endroits divers. Sans autre moyen d'acquérir une version correctement déprotégée, les joueurs n'avaient pas d'autres solutions que d'acheter le jeu original, si bien que pendant longtemps, « Dungeon Master » fut pour de nombreux joueurs le seul jeu original parmi une logithèque de jeux copiés.
Dans une interview, un ancien membre des groupes BBC / Automation, Andy The Arfling s'est exprimé au sujet de cette protection :
« Dungeon Master » semblait être écrit dans une sorte de langage interprété qui le rendait très difficile à comprendre. Il y avait également une protection intégrée tout au long du jeu. Une bonne protection c'est comme un bon cryptage, cela ne peut jamais être implémenter après coup, cela doit faire partie du tissu du jeu. Apparemment, il y avait un contrôle de protection après le boss final, juste pour que vous ne puissiez pas voir la séquence de fin. Chapeau à eux. Chapeau à Was (Not Was) pour l'avoir craqué.
Andy The Arfling, ancien membre des groupes BBC / Automation
Un autre membre d'un groupe tout aussi célèbre, les Medway Boys s'est exprimé aussi sur la protection.
La principale raison pour laquelle il a fallu si longtemps pour cracker complètement « Dungeon Master » était qu'il fallait des mois pour terminer le jeu en lui-même. La protection étant vérifiée tout au long du jeu et le "mode d'échec" faisant partie du jeu lui-même, tout devait être joué jusqu'à la fin pour tester correctement le crack et révéler l'étendue de la protection. Si un système de protection identique avait été utilisé sur un simple jeu de tir qui pouvait être entièrement testé en quelques heures en ajoutant un trainer de vies infinies, il aurait certainement été craqué en quelques jours ou quelques semaines, comme tout le reste.
Zippy, ancien membre des Medway Boys
Le jeu dispose de plusieurs mécanismes de protection le rendant incopiable avec un matériel standard.
La protection principale est basée sur l'utilisation de la technique des "fuzzy bits", dit « bits flous ». La caractéristique des bits flous est que parfois la tête de lecture renverra un '0' et parfois un '1' : la valeur du bit est aléatoire.
Cette technique des bits flous est impossible à reproduire avec les contrôleurs des lecteurs de disquette équipant les ordinateurs personnels comme Atari ST, Amiga, PC, Macintosh, etc, en effet la copie implique systématiquement une conversion en « 0 » ou « 1 », une des astuces trouvées par certains pour la contourné était tout simplement de ne pas copier ces secteurs, encore fallait-il le savoir et savoir comment le faire. Un matériel spécialisé est donc nécessaire mais ce matériel est couteux.
Afin de vérifier si la disquette est originale, le jeu lit plusieurs fois les secteurs contenant des bits flous et compare les résultats : si leur valeur est différente d'une lecture à l'autre alors la disquette est originale. Si leur valeur est toujours la même, le disque est une copie.
Le programme lit périodiquement le secteur de protection contre la copie contenant les bits flous pendant le déroulement du jeu : lors du démarrage d'une partie et lors du passage à un autre niveau. La détection d'un seul bit dont la valeur change est suffisante pour que le programme considère le disque comme original.
Le code de protection contre la copie dans les versions Atari ST/Amiga/Apple IIGS vérifie qu'au moins certains des bits flous ont des valeurs aléatoires, mais il vérifie également que tous les autres bits du secteur ne sont pas aléatoires.
Cracker un programme signifie modifier le programme afin qu'il contourne sa vérification de protection contre la copie. Dans le cas de Dungeon Master, cela signifie supprimer ou contourner les tests qui vérifient la présence des bits flous.
Doug BELL savait que les pirates de logiciels essaieraient de casser le jeu, il a donc inclus de nombreuses astuces pour rendre leur tâche aussi difficile que possible : contrôle à divers endroits du jeu des bits flous, code caché dans des images du fichier GRAPHICS.DAT, contrôle multiple sur les checksums des bloc de données de manière à si on modifie le code du jeu alors le programme détectera qu'il a été cracké et donc de continuer d'y jouer normalement.
Dans de nombreux jeux, les contrôles de protection contre la copie renvoient immédiatement un message d'erreur lorsqu'une copie est détectée. Certains contrôles de protection contre la copie fonctionnent de cette manière dans Dungeon Master. Mais d'autres sont plus sournois:
Lorsque certains des tests de protection contre la copie multiple échouent, le jeu ne s'arrête pas immédiatement et vous pouvez continuer à jouer pendant un certain temps. Mais tel une bombe à retardement, à un moment une réponse se produit enclenchant des anomalies de programmes comme le jeu qui se bloque, ou ne détecte pas que la disquette est dans le lecteur, ignore les clics de la souris, ou fait mourir instantanée toute votre équipe. Un des symptômes significatifs et des plus inattendu est de figer l'univers du jeu ! Les objets lancés restent en l'air, les portes ne s'ouvrent/ne se ferment plus, les créatures sont comme tétanisées, etc. et peu de temps après, un message s'affiche : "SYSTEM ERROR 60" provoqué par à un dépassement de capacité de la mémoire tampon.
Les routines de protections de « Dungeon Master » sont redondantes mais isolées entre elles de sortent que si une est trouvée elle ne mènera pas aux autres. Les vérifications se chevauchant et se recoupant entre elles. Cela a rendu la tâche plus difficile pour déprotéger le jeu, car cela nécessité pour les hackers de trouver et neutraliser toutes ces points de contrôle et pour en être sûr il fallait finir le jeu, le tester dans ses moindres arcanes, inspecter minutieusement le déroulé du code.
Je savais que la protection contre la copie finirait par être cassée, mais que plus elle tiendrait longtemps, moins nous subirions de dommages lorsqu'elle serait cassée. Nous avions l'avantage de détenir le brevet sur un système de protection contre la copie de disquettes qui nécessitait un périphérique matériel spécialisé de 40 000 $ pour écrire les disques. Il était impossible de créer une image disque sans ce matériel, et le matériel lui-même était hors de production. Cela signifiait que tant qu'il y avait suffisamment de couches sur la protection contre la copie et que ces couches prenaient suffisamment de temps pour se fissurer, la seule façon de posséder le jeu était de l'acheter.
Le système de protection contre la copie a pris quelques semaines à être créer, et bien que cela ait augmenté le coût de la production sans ajouter de valeur pour le client, c'était du temps bien dépensé. La protection contre la copie reposait sur de nombreux contrôles et contre-vérifications redondants, superposés et isolés. La protection contre la copie a été développée avec l'hypothèse que le hacker serait équipé d'un émulateur matériel et développé en tenant compte des capacités et des limites des émulateurs couramment disponibles à l'époque.
« Dungeon Master » avait une pénétration du marché supérieure à 50% sur l'Atari ST, c'est-à-dire que plus d'un exemplaire de Dungeon Master était vendu pour deux ordinateurs Atari ST acheté. C'est facilement 10 fois la pénétration de n'importe quel autre jeu de l'époque sur n'importe quelle autre plate-forme.
Doug BELL, programmeur de Dungeon Master
Entre une protection coriace mais qui a finalement été crackée et les projections optimistes de Doug BELL, à combien d'exemplaire « Dungeon Master » s'est finalement écoulé ?
Dans un très bon dossier sur le piratage du Tilt #61 datant de décembre 1988, en page 112 le journaliste Dany BOOLAUCK indique :
Le champion de la protection sur ST reste pour l'instant « Dungeon Master » qui a résisté pendant au moins deux mois ! Résultat : « Dungeon Master » tient le haut du pavé des ventes avec 17 600 (environ) unités vendues, rien qu'en France !
Dany BOOLAUCK, journaliste à Tilt Magazine
Le magazine anglais ST Format issue #10 avance qu'en mai 1990, « Dungeon Master » se serait vendu à plus de 60 000 exemplaires dans le monde.
Enfin le magazine Dream indique dans son numéro 18 de mai 1995 en page 20 que Dungeon Master se serait vendu depuis 1987 à plus de 250 000 copies rien qu'en Europe ! Un chiffre qui peut paraître disproportionné, mais s'il s'avérait exact, il ferait de « Dungeon Master » le jeu le plus vendu de toute l'histoire des micro-ordinateurs ST/Amiga.
Malheureusement, FTL n'a semble-t-il pas anticipé ce succès. Malgré tout le travail investi pour créer des outils propriétaires comme un éditeur de niveau, un convertisseur sur différentes plateformes, permettant même à l'optimiste Wayne HOLDER d'affirmer en 1988 que la technologie qu'ils avaient développée pour « Dungeon Master » permettrait bientôt à FTL de produire quatre à six jeux par an ! FTL se retrouve dans l'incapacité de proposer quoi que ce soit de nouveau pendant de très longues périodes mis à part l'extension à « Dungeon Master », « Chaos Strikes Back », éloignant un peu plus le rêve de Wayne HOLDER de faire de FTL l'Infocom des CRPG si ce n'est celui d'un Infocom qui n'a jamais pu dépasser « Zork » .
Face à ce vide laissé par FTL, un marché parallèle de produits en tout genre apparait, une douzaine de fascicules détaillant des astuces, les cartes des niveaux, des disquettes remplis de conseils tactiques sur la meilleure façon de combattre les différents monstres et même un CD audio officiel de FTL - « Dungeon Master: The Album » - contenant des airs censés être inspirée du jeu, avec des titres emblématiques comme "Hall of Champions", "The Adventure Begins" et "Riddle Room".
Une autre erreur de FTL est de n'avoir pas vendu l'outil de création des donjons qu'ils avaient développé en interne « Dungeon Master Construction Set », un outil complet, soigné, qui aurait pu permettre à de nombreux joueurs de créer leurs propres aventures...
A défaut de disposer de l'outil maison de création de donjons de Mike NEWTON, peut être perdu à tout jamais, il existe un éditeur d'époque non officiel, un des seuls à ma connaissance appelé « Dungeon Master Editor » (téléchargeable ci-contre) créé en 1988 par Edward PENMAN sur Atari ST (une version Amiga existe aussi) permettant d'éditer les niveaux de « Dungeon Master ».
De son côté la brèche entrouverte par FTL a initié une multitude de jeux, plus ou moins réussis mais dont certains se sont révélés être de vrais pépites comme « Black Crypt », « Eye Of Beholder » ou bien plus tard « Ultima Underworld ».
Avec un brin d'amertume, Wayne HOLDER a un avis plus tranché sur les jeux qui ont suivi les traces de « Dungeon Master » :
Je n'ai pas vraiment vu quoi que ce soit où ils ont fait beaucoup plus que suivre nos traces. Nous nous attendions à être imités et nous pensions que les gens feraient progresser le genre, mais c'était incroyable de voir combien de choses que nous avions fait étaient complètement copiées. Les flèches de déplacement à l'écran, par exemple. Nous avons dû expérimenter des dizaines de combinaisons différentes avant de les disposer comme nous l'avons fait. C'est vraiment là que se trouve votre investissement en temps, déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. C'est incroyable le nombre de jeux que je regarde et que je vois ces mêmes flèches de déplacement.
Wayne HOLDER, Fondateur de FTL
Les anglais de Magnetic Fields (Lotus Turbo Esprit, Super Cars:) sortiront en 1994 sur Amiga, un dungeon crawler ayant pour titre: « Crystal Dragon » dont les graphismes rappellent fortement « Black Crypt ». Hommage ou non, beaucoup de développeurs et d'artistes revendiques l'influence qu'à eu « Dungeon Master » sur leur création.
Ainsi Dan SCHMIDT, scénariste et programmeur d'Ultima Underworld confiait dans un blog :
C'est probablement évident, mais « Dungeon Master » était définitivement une référence lorsque nous avons créé « Ultima Underworld ».
Dan SCHMIDT, Programmeur d'Ultima Underworld
Corey COLE connu avec son épouse Lori pour avoir créé la célèbre saga des « Quest for Glory » chez Sierra revendiquait aussi l'influence qu'à eu le jeu de FTL sur ces jeux qui ont suivi :
« Dungeon Master » a également eu une influence importante sur « Hero's Quest » et le reste de la série « Quest for Glory ». Au moment de sa sortie, Lori et moi développions un système de publication assistée par ordinateur pour l'Atari ST. Après « DM », il est devenu évident que nous préférerions de loin créer des jeux informatiques.
Si j'avais connu cette histoire à l'époque, nous aurions pu parler à Wayne et aller travailler pour FTL au lieu de Sierra. :-) « Sundog » et « Dungeon Master » étaient mes deux jeux préférés à cette époque.
Incidemment, des années plus tard, j'ai rencontré Bruce WEBSTER - il est maintenant avocat spécialisé dans les droits de propriété intellectuelle. C'est un gars très cool et il a un projet open-source Sundog sur le web qui hélas n'est pas allé loin.
Corey COLE, Créateur des Quest For Glory
Tout commence devant une grande porte massive, en s'ouvrant sur « Dungeon Master », c'est le début d'une aventure au-delà de tout ce qu'on avait vu auparavant qui se présentait à nous: nous étions en 1987 et rien ne présager de l'importance que ce jeu aurait sur les joueurs. Le phénomène « Dungeon Master » était née.
Mais nous n'en étions pas encore là... Passons sur le scénario dont nous étions peu à en connaitre le contenu à l'époque, la plupart des joueurs ne lisant pas les manuels et l'autre partie jouait avec une version pirate. Après un temps de chargement qui pouvait semblait interminable, ce qui surprend dès les premières secondes de jeu c'est l'interface graphique notamment la zone de jeu en vue subjective qui représente presque 60% de l'écran, une taille imposante surtout comparé à ce qu'on avait l'habitude de voir jusqu'alors.
Après quelques pas, vous vous trouvez devez une inscription étrange gravée dans le mur: « Hall Of Champions »
Entièrement géré à la souris, l'interface se veut être intuitive, tellement intuitive qu'il est même inutile de lire le manuel, pour ceux qui le posséder, pour la maitriser. Un parfait équilibre ergonomique, visuel et d'efficacité. Chaque action se veut être simple, en premier la gestion de vos quatre compagnons : Récupérer des objets, les faire manger ou simplement visualiser leur état de santé, etc:. Une autre zone permet les actions de type combat ou pour jeter des sorts. Une autre affiche les flèches de déplacements.
Le premier niveau nommé "hall of champions" n'en est pas un, c'est ce qu'on appelle dans les JDR la phase de constitution de l'équipe, et pour « Dungeon Master » cela permet aussi de se familiariser avec l'interface et les commandes du jeu. Dans cette phase vous déambulez dans les couloirs et faites face à des avatars de champions posés sur les murs, emprisonnés dans des miroirs par Lord Chaos himself. Vous devez en choisir quatre parmi vingt-quatre personnages. L'histoire nous dit que ces champions avaient en leur temps défier le mage noir pour se retrouver emprisonnés, cryonisés tel un Ian Solo dans "Empire Strikes Back".
Pour la petite histoire, FTL a tiré l'inspiration de ses avatars à travers des personnages réels ou imaginaires, de la littérature ou cinématographique comme Chani dans Dune, ou Gothmog le lieutenant de Morgul à la bataille du Pelennor dans Le Seigneur des anneaux ou encore Zed directement issu de leur jeu précédent « Sundog : Frozen Legacy ». On y trouve aussi des personnalités historiques comme l'explorateur viking Leif Eriksson mais aussi, parce que le monde du jeu vidéo était à cette époque très masculin, une référence à la modèle Azizi Johari, Playboy Playmate de 1975.
Bien qu'on ne le sache pas au début du jeu, le choix de ses combattants joue un rôle prédominant dans la suite de l'aventure. Si les vaillants guerriers trouvent rapidement leur utilité dès le début, maniant les armes avec dextérité, les sorciers et les prêtres, capable de jeter des sorts, ne deviennent essentiels que dans les niveaux supérieurs. Constituer une équipe est donc un élément stratégique à part entière, de mauvais choix pourront vous complexifier considérablement la tâche, voir vous mettre dans l'impossibilité d'arriver au terme de l'aventure ou difficilement. Choisir un groupe équilibré c'est une chance de plus d'espérer terminer l'aventure.
Un choix cornélien s'offre donc à vous dès le départ, qui choisir et comment les ramener à la vie ? les réincarner ou les ressusciter ?
Au départ FTL souhaitait inclure un kit de construction du personnage que le graphiste Andy JAROS avait créé, Wayne HOLDER se souvient d'une scission dans son équipe entre les gens "qui voulaient juste choisir un personnage et y aller" et ceux qui voulaient entrer dans un processus plus stratégique de création, personnalisant chaque détail à leur guise comme dans les CRPG d'autrefois. Mais, plus qu'un simple inconvénient pour les impatients nouveaux joueurs, un processus de création de personnage aurait joué en défaveur du sentiment d'immersion instantanée qui a toujours été la philosophie directrice du jeu. Ainsi, l'errance du joueur dans le casting du « Hall of Champions » plonge le joueur dans un monde dont il n'aura pas forcément la main et dans lequel il devra faire avec ce qui lui est proposé.
En guise de réponse à ce terrible dilemme pour les joueurs qui demandaient à customiser plus ou moins leur personnage, FTL a permis de « ressusciter » ou de « réincarner » chaque personnage.
Ainsi ressusciter un champion permet de récupérer toutes les compétences et les statistiques qu'il avait lorsqu'il fut emprisonné alors qu'à contrario le réincarner lui fait perdre tous ses niveaux de compétences. Evidemment dit comme cela le premier choix semble être évident car cela facilite grandement le début de partie notamment grâce aux points de compétences plus élevés. Pourtant sur le long terme la réincarnation s'avère un bien meilleur choix car elle permet à vos champions de progresser plus rapidement et d'améliorer leurs statistiques bien mieux que s'ils avaient été ressuscités.
Chaque champion possède ses propres caractéristiques : Vitalité, Force, Mana... leur donnant des capacités plus ou moins intéressantes dans quatre classes : guerrier, ninja, prêtre ou sorcier,. En combinant les spécialités de chacun - le combat pour le guerrier, la magie pour le magicien, la préparation de potions pour le prêtre et le lancer d'objet et le combat à mains nues pour le ninja - le joueur fait progresser ces derniers dans leur domaine de prédilection. Ici, pas d'élément superflue comme le charisme, le jeu se concentre sur les caractéristiques prioritaires, celles consistant à tuer des monstres et à cartographier des donjons pour mieux avancer dans l'aventure.
Chaque classe comporte neuf niveaux de spécialisation, allant de néophyte à maître, chaque passage à un niveau supérieur permette de renforcer les caractéristiques des personnages : la santé, l'endurance et la magie auxquelles s'ajoutent un certain nombre de caractéristiques secondaires incluant la force, la dextérité, la sagesse, la vitalité et les résistances au feu et à la magie. Leurs valeurs fluctuent tout au long du jeu, et le maximum atteignable est basé sur les niveaux de capacité de départ de chaque personnage.
Alors que le premier d'entre eux, la santé est une métrique plutôt traditionnelle, le second, l'endurance fournit un bon exemple de la façon dont « Dungeon Master » transcende si souvent et si subtilement ses racines dans les jeux de plateaux et des CRPG précédents. Lorsqu'un personnage s'exerce - en se battant ou en courant rapidement, et surtout en portant une charge lourde - son endurance chute, diminuant son efficacité au combat et le ralentissant. Il ne peut retrouver de l'endurance qu'en se reposant ou par des moyens magiques. Les personnages les plus faibles se fatiguent naturellement plus rapidement que les plus forts. Ce mécanisme serait impossible à reproduire sur les jeux de plateaux et caractérise en cela l'apport de la matérialisation des RPG en leur pendant informatique.
Pour combattre les monstres, le joueur peut équiper ses champions de différents types d'armes, d'armures et d'objet magique comme des parchemins, des potions de défenses ou des boites magiques. Chaque personnage dispose d'un inventaire pouvant stocker jusqu'à dix-sept objet, le nombre d'objet qu'il peut porter étant aussi limité par leur poids que le personnage peut transporter et qui influe sur la vitesse à laquelle le personnage peut se déplacer.
« Dungeon Master » est un jeu qui se déroule en temps réel, en cela il se distingue des CRPG précédent, cela se traduit dans les combats mais pas seulement. Une action comme enclencher un mécanisme, mettre une clé dans une serrure, composée un sort, récupérer un objet, etc... la vie dans le dungeon ne s'arrête pas dans l'attente de votre action, vous pouvez donc vous faire attaquer par des monstres et c'est donc à vous de prendre toutes les précautions nécessaires. D'autres réalismes du jeu comme la lumière des torches qui baisse au fur et à mesure qu'elles se consument, la fatigue des champions qui se fait ressentir, le besoin de manger, de boire et de dormir pour reprendre des forces, les blessures qui diminuent les aptitudes tant qu'elles ne sont pas guéries. N'emportez pas non plus tous les coffres et armures qui se présentent à vous, vous seriez en surcharge et n'oubliez jamais que votre équipe se déplace toujours au pas du champion le plus lent. Il vaut mieux être léger, surtout si vous vous faites courser par un monstre !
Le simple fait de se rassasier dans « Dungeon Master » prend enfin du sens. Par exemple une simple pomme trouvée sur votre chemin (en dehors de toute objectivité de trouver une pomme comestible posé là sur le sol en plein milieu d'un donjon), prend matériellement forme, on peut choisir de la garder, ou de la consommer de suite. Ce principe si simple, si évident de nos jours, n'en était pas encore un en 1987 et c'est vraiment « Dungeon Master » qui l'a démocratisé. Jusqu'ici dans les CRPG de type « Ultima », la nourriture était une chose quasi abstraite représentée par une donnée qui montait et qui descendait parmi une liste d'autres valeurs statistiques, là où dans « Dungeon Master » elle devenait pour une fois une ressource concrète, presque palpable et réelle. Une autre particularité étant qu'il est également possible de manger certaines créatures, comme les champignons hurleurs, après les avoir tués et découpés en rondelles.
Lors des combats, vous constaterez que deux personnages sont à l'avant et les deux autres à l'arrière. Les héros de l'arrière ne peuvent utiliser que les armes de jet ou la magie. Vous devez donc positionner mages et archers à l'arrière tandis que les guerriers et ninjas les protègeront à l'avant. Attention tout de même, il peut arriver que des monstres vous attaquent devant et derrière ! Dans quelques endroits du donjon, ils peuvent même vous attaquez de tous les côtés.
Une fois l'équipe constituée, la partie commence. Vous passez une porte qui ne s'ouvre qu'après avoir choisi au moins un personnage (impossible de passer la porte sans avoir choisi vos champions ! J'ai essayé) et trouvez à vos premiers parchemins énigmatiques « Invoque le FUL et tu obtiendras une torche magique ». C'est là que le manuel devient nécessaire pour comprendre que la rune "FUL" décrite dans le parchemin correspond l'élément « feu ».
Quelques mètres plus loin dans un renfoncement dans le mur, un autel avec un autre parchemin « Les vieux os auront une nouvelle vie »: signe que même après la mort, une nouvelle chance vous sera peut-être possible.
La partie ne commence réellement qu'au niveau -1. Très vite un premier adversaire vous fait face: une Momie. Pour battre ce montre, pas de magie vous n'êtes pas encore prêt pour cela, quelques coups de masse suffiront.
Avec plus d'expérience, et quelques parchemins, vous pourrez faire vos premiers sorts, des potions de soins ou encore lancer des boules de feu.
Tout cela nous amène au système de magie extrêmement original basé sur des « runes » (syllabes magiques dans le manuel français) et qui fut après « Dungeon Master » maintes fois copié et qui en a fait aussi son succès. Ici pas de listes de formules magiques toutes faites, c'est à vous de chercher et de constituer les sorts à partir de combinaisons de symboles appelés runes.
Les formules magiques sont classées en deux catégories : les potions pour les prêtres (anti-poison, portion de vie:) et les sorts pour les magiciens (lumière, invisibilité, boules de feu: ) . Chaque formule nécessite de deux à quatre runes selon la complexité du sort. Le premier symbole donnera la puissance du sort ; le suivant l'« influence élémentaire » (l'eau, l'air ou le feu), puis une « forme » (comme une araignée, une aile ou une lance) ; et enfin une « classe ou un alignement » (comme un combattant ou un sorcier, ou bien ou mal).
Les sorts plus puissants - comme la boule de feu (fireball) ou poison charm - nécessitent d'utiliser une succession de quatre runes qui coûte des points de mana, l'énergie magique. Ce coût étant fonction du niveau de magie du personnage. Pour découvrir de nouveau sort, le joueur ramasse des parchemins ou alors il expérimente de lui-même des combinaisons, avec un bémol car certains sorts ou potions ne sont cependant accessible qu'aux prêtre ou magicien les plus puissants.
Bien sûr au commencement, on ne connait aucun sort, mais au fur et à mesure que vous progresserez dans le donjon, vos compétences vont augmenter, votre répertoire de formules magiques va s'agrandir notamment grâce aux parchemins trouvés.
Invoquer chaque rune demande de l'énergie, qui augmente à mesure que vos personnages progressent en niveaux de compétence. Chaque nouveau sort demande de la pratique. Lorsque vous apprenez un nouveau sort pour la première fois, vous devez vous attendre à ce que chaque personnage puisse le lancer dans son niveau de puissance le plus bas, et même dans ce cas, souvent un message s'affichera "a besoin de plus de pratique". La clé de la progression étant la pratique, la pratique, la pratique.
Ce qui est réellement jouissif dans « Dungeon Master » c'est la possibilité d'expérimenter de nouveaux sort, dont vous n'auriez pas encore trouvé le parchemin, du moment que votre niveau le permet. Toutefois toutes tentatives, même infructueuses, de composer des sorts au hasard consomment aussi du mana, il faudra donc ne pas lancer trop souvent ce type de tests hasardeux au risque d'être à court d'énergie alors que vous vous trouvez dans une posture délicate.
Ainsi, les prêtres pourront préparer diverses potions de guérison, antidotes, augmentation des aptitudes physiques et/ou spirituelles etc.), tandis que les sorciers pourront, entre autre, lancer des boules de feu (fireball), ou encore jeter un sort permettant de voir à travers les murs. Une fois la jauge de mana épuisée, il vous sera impossible de refaire un sort et vous devrez attendre qu'elle se remplisse suffisamment pour refaire de la magie. Il existe des dizaines de formules différentes, dont la liste est facilement trouvable de nos jours sur internet mais est par contre complétement absente du manuel si bien qu'à l'époque de la sortie du jeu il fallait tâtonner, expérimenter, scruter les questions/réponses des mags voir s'échanger des formules trouvées avec ses copains de classes. Cette part de recherche et de partage a certainement contribuer au bouche à oreille positif dont le jeu a bénéficié et à asseoir sa notoriété, bien qu'on imagine, au grand daim de FTL, qu'au sein de ses jeunes joueurs beaucoup de ces versions étaient... piratées.
Côté environnement, le donjon est composé de quatorze niveaux. Chaque niveau est un labyrinthe qu'il faudra absolument comprendre pour espérer passer au niveau suivant. Ces niveaux sont parsemés d'obstacles, comme des passages secrets, des trappes, des murs d'énergie ou de téléportation. Les niveaux sont peuplés de différents types de monstres pouvant se révéler redoutables, les premiers niveaux sont ainsi hantés par des momies, des fantômes, une guêpe et des vers géants. Heureusement pour vous revitalisez des armes, de la nourriture et des objets sont dispersés dans le donjon.
Au cours de vos déambulations, vous apprendrez à surveiller les différents critères de bonne forme de vos équipiers. Il faudra leur accorder régulièrement des temps de repos sans oublier de les nourrir ou de les faire boire. L'eau et la nourriture peuvent être trouvés assez facilement sur votre parcours. Il est également possible de manger certaines créatures, comme les champignons hurleurs, après les avoir tués ils sont dispersés en plusieurs morceaux façon puzzle,.
La santé diminue avec les coups ou les sorts reçus lors des combats, l'endurance est relative à différents paramètres mais remonte avec un peu de repos, le mana diminue lui fortement à chaque sort lancé.
La progression elle se fera par le combat pour les guerriers, par des conjurations pour le sorciers et prêtres.
Neuf niveaux de spécialisation, allant de néophyte à maître, existent ainsi dans le jeu, chaque passage à un niveau supérieur permettant de renforcer les caractéristiques des champions.
Un autre point important est la possibilité de faire évoluer son personnage dans une classe sans les restrictions arbitraires qui avait été induite dans les CRPG - un rejet du concept même d'être cloisonné dans sa classe de départ. Au lieu que chaque personnage ait une seule classe qu'il détiendra pour toujours, avec des restrictions arbitraires associées de « Donjons et Dragons » comme l'impossibilité d'un magicien à utiliser des armes tranchantes ou à porter une armure, « Dungeon Master » propose quatre disciplines de compétences dans lesquelles n'importe quel personnage peut progresser à tout moment : combattant, ninja, sorcier et prêtre. Comme dans le monde réel, il n'a qu'à s'entraîner pour s'améliorer dans n'importe lequel d'entre eux.
En balayant les règles, « Dungeon Master » a dû choqué par mal de joueur habitué au système vieillissant et parfois absurde des RPG, bousculant le confort du joueur le rendant même peut-être inconfortablement.
Pourquoi ce jeu vidéo devrait-il adhérer à un système créé pour un ancien jeu de plateau ? Nul doute que les nombreuses discussions internes à l'équipe dont la plupart des employées n'étaient pas adeptes des RPG a permis à FTL de s'affranchir, de se débarrasser des traditions accumulées des RPG.
Les niveaux sont assez grands, parfois complexes, jonchés de pièges, de mur de téléportation... Très rapidement vous comprendrez que pour progresser et vous y retrouvez il faudra établir un plan détaillé de chaque niveau n'est pas indispensable mais fortement recommandé.
Au fur et à mesure de votre progression, vous constaterez que la lumière s'amenuise, la palette de couleurs s'assombrit petit à petit, l'environnement devient progressivement plus lugubre qu'il ne l'était déjà de manière assez réaliste lorsqu'une torche commence à crépiter ou qu'un sort commence à s'épuiser. Il est nécessaire donc de prévoir régulièrement un moyen de s'éclairer. Cette gestion est un élément primordial qu'il vous faudra gérer au mieux. Quelques torches parsèment les couloirs. Une astuce étant qu'une torche ne brule que lorsqu'elle est entre vos mains, dans votre sac elle ne se consumera pas et vous pouvez en récupérer plusieurs et n'en utiliser qu'une à la fois. Une autre méthode consiste à utiliser un sort de lumière, c'est d'ailleurs le premier parchemin magique que vous trouverez. Néanmoins il ne faut pas oublier que votre énergie magique s'épuise vite, à chaque incantation d'un tel sort cela consommera du Mana. Il faudra donc peser le pour et contre, surtout en l'absence de torche et préserver le plus possible votre mana car son utilité peut se faire sentir rapidement lors d'un combat.
Maintenant, nous commençons à descendre les escaliers jusqu'au niveau 2 - le premier "vrai" niveau avec de vrais monstres, où les choses commencent vraiment à devenir intéressantes...
Au final il vous faudra environ 7h pour le terminer quand on le connait déjà, mais ce sont des semaines d'exploration angoissante qui attendent les néophytes, à chercher des objets, des salles secrètes, à résoudre des énigmes et à tuer, ou à échapper, à des dizaines de monstres différents. Et tout ça tient sur une seule disquette !
Pour la plupart des joueurs, Dungeon Master restera une expérience inoubliable, parfois angoissante, prémice d'une nouvelle génération de jeux vidéo, plus beaux, plus grands, plus immersifs, en partie rendu possible par les capacités presques irréelles pour l'époque des nouvelles machines 16 bits. Pour certains ce fut même la seule et unique incursion dans le monde des CRPG. Il faut dire que le jeu FTL avait tout pour plaire. En cassant les codes de ses modèles Wizardry et Ultima, Dungeon Master a su réinventer le CRPG traditionnel avec un nouveau gameplay en temps réels plus orienté action et ainsi séduire un public plus large que celui des initiés. Et si plus de 35 ans après, FTL a disparu et les Dungeons Crawler aussi, Dungeon Master aura marqué de son empreinte indélébile l'histoire des jeux vidéos, se positionnant clairement comme l'un des CRPG le plus innovants et les plus influents de l'histoire, inspirant des jeux comme Black Crypt, Eye of Beholder, Ultima Underworld, Land Of Lore et tant d'autres...