Paul Cuisset est un pilier du monde du jeux vidéo, ses créations ont influencé fortement cette industrie. Touche à tout, il a imaginé et programmé une multitude de styles de jeux allant du casse brique en passant par le jeu d'aventure, la course de moto, le jeu de plateforme... Chaque titre a apporté sa pierre à l'industrie du jeux vidéo et fait bouger les lignes grâce cette volonté chez lui de réinventer les codes.
Il commence sa carrière à travailler sur IBM 360, puis Oric, C64 avant de se réveler pleinement sur Atari ST, Amiga puis consoles et PC.
1987, premier titre avec "Phoenix" sur Atari ST pour Ere informatique puis il enchaine rapidement avec un casse brique "Tonic Title", une sorte d'Arkanoid chez d3m avec comme graphiste un de ses amis Michael Sportouch.
Puis les deux compères se lancent dans la conversion d'un jeu d'arcade qui les a impressionné "Space Harrier" sur Atari ST pour Elite.
Ensuite tout va très vite, le groupe Delphine cherche à diversifier ses activités en créant une branche jeux vidéo, Delphine Studio puis Delphine Software pour laquelle il prend en charge en tant qu'équipe externe "Bio Challenge" tandis qu'une autre équipe travaille en interne sur "Castle Warrior".
1989, c'est la révélation avec le fabuleux jeu d'aventure "Les Voyageurs du Temps", auteur, programmeur pour lequel il invente une nouvelle interface point & clic révolutionnaire à base d'un menu contextuel et de quelques actions clés, le tout sur des graphismes pixel-art signés par le grand Eric Chahi. Un succès énorme. Très attiré par le CDI et les nouvelles possibilités du CD-Rom dès 1989 (Dans une interview pour Joystick, il y voit déjà la possibilité de mettre des jeux avec des séquences filmés sur CD, la montée des PC et se projette dans le développement sur consoles !). Il crée et dirige le département cinématique dont l'idée est de rapprocher les 2 arts jeux vidéos et le cinéma. S'enchaineront alors des jeux d'aventure très célèbres comme "Operation Stealth", "Croisière pour un cadavre" puis le célèbre "Flashback" qui a connu un énorme succès si bien que 30 ans après tout le monde connait encore ce jeu.
La suite sera encore couronnée de succès avec "Fade to Black", "Shaq Fu", "Moto Racer", "Amy" ou "Darkstone".
Il aura moins de chance sur la production de "Subject 13" et le studio VectorCell qu'il a fondé sera placé en liquidation judiciaire.
Toujours très productif dans le monde du jeux vidéo, il a récemment fait un remake de Flashback en HD sorti sur PC, Xbox One et PS4.
Fin 2023, il revient avec la suite tant attendu de Flashback édité chez Microids, Flashback 2 sort sur PC, PS5, Xbox Series X
C'était vraiment une surprise parce qu'on ne s'attendait pas du tout à cela. C'est mon ami Michael Sportouch et Denis Mercier on était une petite bande de fans. On s'était rencontrés dans une boutique d'informatique et puis on bavait tous devant les jeux qu'il y avait et on a fini par parler ensemble et à découvrir cette passion pour les jeux et donc c'est comme ça qu'on a décidé de commencer à faire notre propre jeu. Et donc après avoir écrit et fait "Tonic Tile" qu'on avait réussi à publier mais c'était vraiment assez confidentiel, en fait Michael et Denis sont partis en angleterre pour rencontrer ELITE au culot. C'était marrant parce qu'à l'époque Michael je crois qu'il avait 16 ou 17 ans et Denis 17 ou 18 tout juste donc vraiment c'était des gamins qui vont vont voir ELITE alors c'était pas non plus une très très grosse boîte à l'époque même s'ils étaient connus c'était pas énorme, et il leur montre la démo et contre toute attente les gars nous rappellent en disant tiens on est intéressé on a un projet de faire l'adaptation de la borne arcade "Space Harrier" et voilà c'est comme ça que ca a commencé et qu'on s'est lancé.
C'était un rêve de pouvoir de pouvoir programmer cette borne là c'était un challenge énorme. La borne d'arcade est impressionnante même aujourd'hui. Et de se dire qu'on va reprendre ces choses là et qu'on va essayer de faire une version Atari et Amiga, c'était un gros gros challenge en plus après avoir signé le contrat j'apprends que je dois partir à l'armée donc du coup c'était assez compliqué. J'ai fait l'adaptation pendant mon service militaire pas pendant mes premiers mois de classe mais un peu plus tard une fois que j'ai eu un peu plus de liberté donc je revenais et le soir pendant mes permes je codais le jeu.
Pendant ce temps-là Michael et Denis s'occupaient des graphismes surtout Michael sur les graphismes de cette version là, Denis faisait autrechose mais en fait le truc c'est qu'on n'avait pas du tout de sources, on n'avait rien, on n'avait pas d'info. En fait ELITE nous avez dit voilà c'est la version et débrouillez-vous, y a la borne. On n'avait même pas le droit à des crédits et on a payé avec nos propres sous. On allait filmer en cachette la borne parce que sur les Champs, on n'avait pas le droit de filmer, du coup le patron nous voyait d'un mauvais oeil et en plus on n'était pas très crédible, on était une bande de gamins, évidemment et entendre "on est en train de faire l'adaptation de ce jeu là" et il se disait "ils sont fous c'est pas possible ils nous pipottent". Et donc on était obligé de filmer sous le manteau et on mettait des pièces et on filmait pour essayer d'avoir tout le déroulé du jeu. Et ensuite c'était le casse tête Michael reproduisait les graphismes et moi j'essaie de reproduire le gameplay et toutes les animations, les mouvements et la vitesse du jeu donc c'était un bon apprentissage.
C'était beaucoup plus simple que çà, c'était débrouillez-vous vis à vis du jeu [rires], donc en fait on a refait le jeu en quelque sorte. Les animations on les a redessinés une par une, tous les mouvements, toutes les attaques des ennemis etc, donc c'était assez impressionnant. En plus il y avait un challenge technique important la machine d'arcade c'était une grosse machine qui pouvait afficher des sprites énormes et donc du coup sur Atari, Amiga c'était assez chaud mais c'était une bonne expérience en tout cas.
En fait c'est assez simple pour ce qui est de "Bio Challenge" c'est Denis et moi qui avons eu l'idée du jeu. Denis avait réalisé quelques images, quelques animations etc qui étaient vraiment très sympa et du coup on a établi une sorte de concept et puis on l'a speeché à Delphine en leur expliquant le jeu qu'on veux faire. On était plus crédible parce qu'on avait déjà deux jeux qui avaient été publiés dont "Space Harrier" qui était vraiment très connu, ça a été assez facile ils nous ont fait confiance et ils nous dit "Ecoutez on sait pas trop à quoi ça va ressembler on sait pas trop mais on ne connaît pas de toute façon les jeux vidéo et à la limite on vous fait confiance [rires]
Et puis ça a bien marché et donc c'est comme ça que c'est parti et que l'on s'est mis à travailler sur "Bio Challenge" avec Denis. Michael de son côté était directeur chez Delphine, il s'occupait du studio, c'est lui en fait qui a créé le premier jeu "Castle Warrior", l'idée vient de lui. Il y avait deux structures, une en interne de deux personnes, deux programmeurs ou un programmeur et un graphiste je ne sais plus, qui ont travaillé sur "Castle Warrior" et nous on était indépendant et on travaillait de chez nous. Delphine avait monté un petit studio, il y avait des locaux disponibles où notamment travailler les gens. Ils ont embauché un programmeur et un graphiste il me semble et c'est eux qui s'occupait de l'autre projet. Voilà il y avait un projet interne et un projet externe, c'est comme cela que tout a commencé.
"Les Voyageurs du Temps" est un des premiers jeux point & clic. En fait j'étais un fan de jeu Sierra qui avait fait la série des King Quest mais à l'époque c'était des jeux qui étaient exclusivement sur pc et qui se jouaient au clavier et donc tapaient des mots clés par exemple "prendre photo", "regarder photo" et en anglais et le programme analysait un petit peu ce qui était tapé et renvoyait une réponse souvent un petit peu à côté. Mais voilà c'était déjà des aventures texte en quelque sorte mais animés parce qu'il y a quand même un personnage qu'on pouvait bouger ; on trouvait ça assez génial.
Mais en fait j'avais envie de faire quelque chose de différent, un peu plus facile d'accès; Beaucoup de gens m'avaient dit écoute moi je suis pas trop fan parce que c'est compliqué à jouer puis taper les mots clés comme ça en anglais c'est un peu barbare donc c'est comme ça j'ai eu l'idée d'en faire un et de mettre en place un système de clics. On clique sur les l'objet et puis un petit menu apparaît comme ça et qui nous permet avec cinq actions de faire tout. Je me suis dit finalement ces actions on peut résumer à des concepts simples et donc en fait j'avais construit le jeu avec 5 actions possibles et ça permettait de simplifier énormément le système et de proposer du coup une interface complètement à la souris il y avait juste à cliquer utiliser le menu pour faire les actions sur les objets etc.
C'était assez nouveau, en fait j'avais jamais vu ça nulle part mais à l'époque c'était normal parce qu' on se basait rarement sur ce qui existait et comme ca n'existait pas il fallait tout inventer. Donc j'ai développé un moteur spécial, un outil spécifique pour pouvoir justement à la fois faire tourner le jeu, les animations, etc et prendre en compte justement ce système de cliquer sur les objets et le menu contextuel grace une bouton droit de la souris etc possibilité d'utiliser les objets les uns sur les autres et donc ca il n'y avait vraiment rien à l'époque; de toute façon c'était assez habituel de créer son propre moteur, un moteur spécial pour tout çà qui s'appelait le système cinématique d'où le nom ensuite de la série qui est devenu "Delphine Software Cinématique" parce que justement on utilisait le système cinématique pour faire les jeux.
C'est çà, j'étais un fan de James Bond de la série, enfin des bouquins et puis des films et donc j'ai envie de faire quelque chose d'un peu différent "des Voyageurs du Temps" de la sf là j'avais envie de revenir à quelque chose de plus exotique, avec des agents secrets avec les tyrans et c'est en fait assez marrant. Et puis en fait "Opération Stealth" a été un grand changement parce qu'en fait c'est sur ce jeu là que j'ai rejoins Delphine et que j'ai pris la direction du studio. Eric de son côté lui avait envi de plancher sur un autre projet donc du coup je n'ai pas pu bosser avec lui en fait il commencait à travailler sur "Another World" et donc moi j'ai rejoins Delphine et donc l'équipe interne et c'est comme ça qu'on a lancé "Operation Stealth" avec de nouveaux graphistes, une nouvelle équipe.
Donc c'était un premier projet différent, évidemment il y a l'évolution du moteur etc notamment on a inventé après le point & clic la recherche de chemin. En dans "Les Voyageurs du Temps" quand on clique le personnage ne sait pas faire le tour, il ne sait pas contourner les obstacles etc en fait c'était l'amélioration que je voulais apporter au jeu, rendre les choses plus simples et donc du coup on a le gros gros changement c'était çà, de pouvoir cliquer un endroit et faire en sorte que le personnage se détache tout seul à l'endroit indiqué qu'il sache éviter les obstacles au passage donc là il y a une grosse refonte du moteur pour réécrire le jeu.
Et puis une nouvelle expérience complètement pour moi parce que j'avais habitude de travailler en petites équipes avec juste un graphiste donc on travaille à deux sur un projet et est là pour le coup l'équipe s'agrandit parce que j'ai un deuxième programmeurs avec moi qui est Philippe Chastel, deux nouveaux graphistes donc cette fois une équipe de quatre personnes. Et là c'est complètement différent on apprend aussi à s'organiser ce qui n'est pas simple [rire] parce qu'il y a plein de tâches et moi j'ai l'habitude de tout faire moi-même donc du coup ils faut que j'apprenne à déléguer et ça c'est compliqué parce qu'il faut tout décomposer etc alors bon c'est celle là on revient à l'informatique c'est que là qu'il faut mettre en place des systèmes de gestion de projet, de planning, de tâches, etc... on est dans une professionnalisation du travail qui est complètement nouvelle et sur lesquelles on n'a pas non plus piste c'est à dire que bon moi j'avais fait une école d'informatique donc j'avais quand même quelques éléments de formations par rapport à la gestion de projet, comment se faisait les projets dans l'industrie mais dans le jeu vidéo c'était pas forcément applicable directement parce que c'était complètement autrechose donc il fallait tout réinventer, çà c'était assez intéressant.