Quand Ocean Software acquiert la licence du premier film sur Batman, c'est en fait la troisième fois que l'éditeur britannique adapte les aventures du héros masqué. Seulement cette fois ce n'est plus pareil, le film est sous le feu médiatique et tout le monde attend l'éditeur au tournant surtout après son succès presque insolent de son jeu "Robocop", qui s'est vendu à pas moins d'un million d'exemplaires ! Comment s'est passé l'achat de la licence ? Quelles sont les coulisses de la construction du jeu ? Qui se souvient de cette version ST avec une vue en batmobile de côté ? Au final que vaut cette nième adaptation d'Ocean Software pourtant connu par le passé pour avoir malmené tant de licences comme "Rambo" ou "Highlander" ?
La ville de Gotham City est gangrénée par la pègre, la corruption et la violence. Cerné par la Police, Jack Napier, le bras droit du chef de la pègre local Carl Grissom décide de faire le ménage pour effacer des preuves dans l'usine de produit chimique Axis Chemical. Le justicier masqué décide d'intervenir mais tout ne va pas se passer comme prévu ...
En cette année 1989 les grosses sorties cinématographique se succèdent « Retour vers le Futur II », « Abyss », « SOS Fantômes II », « Star Trek V: The Final Frontier », « L'Arme Fatale 2 »: à grand renfort de publicité. Le nombre de blockbusters américains est juste phénoménal, historique même, on n'avait pas connu une telle déferlante de films depuis l'année 1982.
Mais le match que tout le monde attend c'est bien celui du prochain film du réalisateur montant du moment Tim Burton et son « Batman » en mode gothique, face au troisième volet des aventures du célèbre archéologue « Indiana Jones » toujours supervisé par Steven Spielberg et Georges Lucas. L'été 1989 sera donc chaud, très chaud. Les pronostics sont lancés : même si aujourd'hui on en connait les résultats : 197 millions de Dollars pour « Indiana Jones et la dernière croisade » et quelques 251 millions pour le premier film « Batman ».
Le « Batman » de Tim Burton n'est pas le premier film à traiter le sujet des super héros, mais c'est bien le premier à aborder cet univers de manière aussi adulte, sombre, bien loin de l'humour et des gags de la série télé kitch des années 60. Ce parti pris de Tim Burton a été en partie influencé par le succès de la bd Dark-Knight de Franck Miller.
Il faut se souvenir qu'à la fin des années 80, le « Superman » de Richard Donner sorti il y a dix ans (1978) reste encore pour beaucoup la référence du film de super-héros. L'attente du public est donc forte, quasi hystérique, suscité par une gestation du projet assez chaotique enclenchée il y a plusieurs années, et qui semble enfin se concrétiser après être passé dans de nombreuses mains (Joe Dante:.) et par de nombreux scripts (les premiers jets incluaient Robin) et dont au final plus personne ne croyait.
L'impact médiatique de cette sortie est à la hauteur de l'événement et n'aura aucun précédent. Le merchandising est juste énorme et « Batman » est partout : sur les bus, stylos, trousses, cartables, casquettes, pins, bonbons, masques, jouets : C'est simple tout ce qui pouvait s'acheter ou presque avait une déclinaison en Batman jusqu'aux céréales reprenant la forme du célèbre logo. En quelques mois le tsunami Batman déferle sur le monde entier et portera le nom de :. « batmania ». Personne ne peut, n'a pu y échapper. Clairement le premier film « Batman » marque le pas sur les films de super-héros jusqu'à atteindre l'overdose dans les années 2000 pour retomber un peu en désuétude 20 ans plus tard.
En tête d'affiche on y trouve un controversé Michael Keaton en Bruce Wayne, une pétition ayant circulé à l'époque pour demander son remplacement et un Jack Nicholson au sommet de sa gloire en Joker. La rumeur dit que l'acteur de « Taxi Driver » et de Shining » aurait réclamé presque 10 millions de dollars pour jouer le Joker, alors que le budget du film est estimé à 35 millions. Il en acceptera finalement « que » 6 millions, mais réussira à négocier une part sur les bénéfices. Le film ayant plutôt bien marché, on estime que l'acteur aurait toucher au final entre 60 et 90 millions de Dollars ! Keaton lui ne se contentera « que » de 3 millions de Dollars ! snifff !
Spectaculaire, divertissant, le film n'en est pas moins le reflet de son époque avec ses qualités et ses défauts. Malgré quelques critiques, passés inaperçu, le succès est mondial et le public se presse dans les salles pour voir le film.
30 ans après, le film se révèle efficace mais très déséquilibré. Alternant des scènes avec des éléments comiques qui ne fonctionnent pas vraiment, des scènes invraisemblables comme celle où le Joker sort son pistolet et abat le batwing, sans compter ces écarts très surprenants avec la BD. Les fans ne s'en remettront jamais, comme par exemple la scène où le majordome Alfred fait entrer la journaliste Vicki Vale dans la batcave ! où celle qui fait de Jack Napier le tueur des parents de Bruce Wayne, et donc le créateur de Batman.
Ajouter à tout cela un Nicholson qui en fait des tonnes jouant un Joker trop caricaturale, énervant, presque trop heureux d'avoir su négocier un cachet indécent, dominant à l'inverse un Batman quasi transparent, schizophrène, à la limite de l'antipathie. Reste les superbes décors de Gotham, la B.O majestueuse de Danny Elfman, la Batmobile bien sûr et la superbe Kim Basinger dans un rôle qu'on peut qualifier de potiche de service, dont on prête d'ailleurs une courte relation avec le chanteur Prince et sa « Bat-danceeeeee », rencontré lors du tournage:
Ocean Software, un doux nom qui sonne aux oreilles des joueurs de cette époque, une période passée certes mais riche et exaltante dans le monde du jeux vidéo et qui va du début de l'informatique populaire et ses ordinateurs 8 bits (Zx Spectrum, Amstrad CPC, C64..) en passant par les 16 bits : Atari ST/Amiga pour finir par le PC où là cela va se compliquer sérieusement pour la société confrontée à des coûts de développements exponentiels, rachetée en 1996 par Infogrames (qui sera renommée en Atari), Ocean disparaitra définitivement deux ans plus tard. On leur doit un nombre incalculable de jeux vidéo, sans aucun doute l'une des sociétés de jeux vidéo les plus prolifiques du secteur à un moment donné avec du bon et du moins bon, voir du très mauvais.
Basée à Manchester, la société Ocean Software fut créée en 1983 par David Ward et Jon Woods et quand elle se lance dans l'adaptation en jeu vidéo du film « Batman », elle a déjà derrière elle une longue liste d'adaptation cinématographique en tout genre : « Highlander », « Rambo - First Blood part II », « Platoon », « Cobra » (le film avec Stallone pas le dessin animé) ou « Short Circuit », etc: et même de séries télés improbables comme « Miami Vice » (« Deux flics à Miami »), « V » (les lézards extraterrestres qui envahissent la terre) ou encore « Knight Rider » (« K2000 ») avec une qualité finale pour le moins discutables pour ne pas dire carrément médiocre : cela jusqu'à l'arrivée de son nouveau directeur Gary Bracey.
Le problème était qu'au début, Ocean avait un très petit nombre de développeurs en interne et sous-traitait beaucoup de ses développements à l'extérieur. Il n'y avait pas ou peu de surveillance de ces développements et donc les studios externes n'étaient pas motivés à faire grand-chose. Cela a entraîné des produits de très mauvaise qualité... C'était une des raisons pour lesquelles j'ai été amené essentiellement à superviser et gérer le développement (tant en interne qu'en externe), parce qu'il n'y avait personne pour le faire.
Gary Bracey, directeur Ocean Software
Ce positionnement de la société à faire des adaptations de films trouve son origine dans un constat simple et évident:
L'une des raisons pour lesquelles les jeux sous licence étaient si populaires auprès des éditeurs était en premier lieu leur faible coût d'acquisition, bien que cela ait changé. Ils étaient vraiment très bon marché. Les sociétés de cinéma les considéraient simplement comme un revenu complémentaire et non comme un gros revenu et donc nous avons pu les acquérir, relativement, à bon marché.
Gary Bracey, directeur Ocean Software
Cette équilibre précaire fut pourtant complétement remis en question par un jeu tiré d'un film de science-fiction de série b qui bouleversa tout:
« RoboCop » a changé tout cela, c'est le jeu qui a fait comprendre à Hollywood qu'ils pouvaient générer des revenus significatifs grâce aux licences de jeux vidéo. C'était la dernière licence dite "bon marché" - Je pense que nous avons payé environ 20 000 $ pour tous les droits numériques sur toutes les plates-formes informatiques, toutes les plates-formes de console, les machines arcade et les flippers !
Gary Bracey, directeur Ocean Software
C'est donc avec « Robocop » qu'Ocean se fait un nom, une réputation. Dire que cette licence de ce petit film de SF personne n'en voulait, et au final le jeu s'est écoulé à: plus d'un million d'exemplaire tout format confondu.
En 1989, en plus de « Batman : The Movie », la société a plusieurs licences dans les cartons : « The Untouchables » (« Les Incorruptibles ») dont le film est pourtant sorti deux ans auparavant, « Red Heat » (« Double Détente ») avec le héros bodybuildé Arnold Schwarzenegger et les adaptations précèdentes (« Predator », « Running Man ») se sont bien vendues car se prêtent assez facilement à une conversion en jeux vidéo d'action : des coups de poings, des coups de poings et: des coups de poings.
Pourtant mis à part quelques conversions comme « The New Zealand Story », les réalisations d'Ocean dans le domaine 16 bits n'ont guère été bouleversantes. « Robocop » a beau avoir atteint le sommet des charts de nombreuses semaines, s'être vendu comme des petits pains, il n'en demeure pas moins une des pires conversions de films de tous les temps sur 16 bits, un jeu vraiment épouvantable au regard de l'excellent jeu d'arcade de Data East dont il s'inspire. Les versions 8 bits sont, elles, par contre de vraies petits bijoux, addictifs, bien pensées et incroyables au regard des capacités de ces machines.
« Batman » semble cependant vouloir marquer une nouvelle ère, un tournant pour l'éditeur qui cherche à se démarquer et relever de manière qualitative ses productions.
Lorsqu'Ocean récupère la licence du film « Batman », la société a déjà en fait sorti deux autres jeux très différents sur le chevalier noir. « Batman The Movie » est donc la troisième adaptation.
Le premier jeu est sorti en 1986 et prenait la forme d'un jeu de plateforme en 3D isométrique, un type de perspective populaire sur les ordinateurs 8 bits. Développé en interne par Jon Ritman, Bernie Drummond et Mark Selin, plus proche de la série potache des années 60 que du Batman sombre à la mode d'aujourd'hui. Le Chevalier noir doit retrouver les morceaux de sa Batmobile et résoudre tout un tas de puzzles tortueux.
Inspiré largement d'un autre jeu « Knight Lore », pour qu'il se démarque de la concurrence il fallait un petit plus :
J'avais vu Knight Lore et j'étais déterminé à écrire un moteur similaire (ou meilleur) - c'est ce que j'ai fait. Bernie et moi avons essayé de trouver un héros que nous pourrions utiliser et dont les gens auraient entendu parler - je pense que c'est moi qui ai pensé à Batman puis nous avons demandé à Ocean s'ils pouvaient obtenir la licence. J'ai conçu l'ensemble du jeu sans aucune contribution de personne d'autre et avec le recul, mon seul regret était qu'il y avait une salle (la 9ème) avec un pont explosif que de nombreux joueurs n'ont jamais réussi à passer - cela n'aurait pas dû être si tôt dans le jeu...
Jon Ritman, Game Designer et programmeur chez Ocean Software
Même si les restrictions et contrôles n'étaient pas aussi forts à l'époque pour une licence de ce type, DC Comics avait un droit de regard sur le jeu et on ne pouvait pas tout faire avec la licence Batman, même s' il semble avoir été assez accommodant, avec néanmoins une seule demande :
Nous avions mis des Bat Pilules (« Bat Pills ») dans le jeu et on nous a sévèrement répondu que Batman ne prenait pas de drogue, alors nous avons changé le nom en Bat Powers.
Jon Ritman, Game Designer et programmeur chez Ocean Software
Développé à l'origine sur Zx Spectrum, le jeu fut converti avec succès sur Amstrad CPC et Msx mais pas sur le pourtant très populaire C64.
La personne qui effectuait normalement les conversions Commodore 64 pour Ocean ne travaillait pas pour eux à l'époque, donc cela n'a jamais été suggéré. Nous l'avions sorti sur toutes les plates-formes Z80, ce qui est dommage c'était que ce fut sacrément réussi et cela a fini par se vendre environ 50 à 60 000 au prix fort. Puis il s'en est vendu autant lorsqu'il est sorti sur l'une des compilations d'Ocean. Après cela, ils ont décidé qu'il fallait tout sortir sur plusieurs plates-formes.
Jon Ritman, Game Designer et programmeur chez Ocean Software
Deux ans plus tard Ocean remet le couvert avec un second jeu « Batman the Caped Crusader » sous licence DC Comics. Cette fois c'est la petite équipe externe de Special FX basée à Liverpool qui se charge de cette adaptation. Une équipe à qui Ocean Software avait l'habitude de sous-traiter de multiples conversions : « Midnight Resistance », « Robocop 2 », « Navy Seals »:. Le produit final fait bonne impression à sa sortie avec des critiques assez positives notamment grâce à des graphismes fidèles à la BD (surtout sur 16 bits), ses énormes sprites, sa petite mélodie reprenant le thème de la série TV, sa superbe illustration signée Bob Wakelin et son système d'affichage innovant où se superposer les scènes du jeu un peu à la manière des vignettes d'un comic book.
Pour ce troisième jeu pour Ocean sur « Batman », Jon Woods fondateur d'Ocean raconte les circonstances de l'acquisition de cette licence.
J'ai eu Batman grâce à une relation avec Warner Brothers à Londres où nous avions déjà licencié « The Neverending Story » (« L'histoire sans Fin »), et j'ai exprimé que nous voulions faire un autre jeu sur Batman. « Un autre jeu sur Batman ? » ils ont dit. "Que diriez-vous de le faire sur le film « Batman » ?" Eh bien, que pensez-vous que fut ma réponse ? Et donc nous avons obtenu les droits et, surtout, nous les avons eu également pour l'Amiga, c'était la version que nous voulions montrer. Mieux encore, nous avons obtenu l'autorisation de regrouper le jeu avec l'Amiga dans un "Pack Batman" c'était une énorme boîte arborant un décor Batman et le logo Ocean. Si nous l'avions demandé à Warner ou à DC Comics: vous savez les personnes qui ont opinion sur tout: ils ne l'auraient jamais permis, mais Commodore l'a fait.
Jon Woods, fondateur d'Ocean Software
Même si certaine rumeur avance le chiffre faramineux d'1 million de dollars pour l'achat de la licence de « Batman - The Movie » par Ocean, un article sur la société Special Fx dans le Retro Gamer Uk n°112 avance le chiffre plus raisonnable de 250 000 £ payé par Ocean en licences de films pour l'année 1989 ce qui incluait « Batman The Movie », « Red Heat » et « The Untouchables ».
Avec l'acquisition de la licence c'est aussi un droit pour un accès exclusif mais limité aux éléments de production bien avant la sortie du film. Et comme une grande partie du film a été tournée aux studios Pinewood en Angleterre, ils ont pu visiter le plateau de tournage et se promener dans "Gotham City" pour se faire une idée réelle de l'atmosphère et du style visuel du film de Tim Burton. Le responsable du développement, Gary Bracey explique cela :
Ils étaient à juste titre paranoïaques à propos de tout matériel visuel avancé divulgué à la presse et donc aucune photo ne nous a été envoyée, à part les documents qui avaient été généralement autorisés à être utilisés de toute façon. Ils ont été extrêmement diligents dans le processus d'approbation. Nous avons eu une première soumission rejetée car "les oreilles de Batman sont trop longues" (d'environ un pixel). Nous avions eu également un accès illimité au tournage dans les studios Pinewood où ils filmaient Batman. C'était très amusant. Je me souviens m'être assis dans la Batmobile et m'être promener dans les rues de Gotham City.
Gary Bracey, directeur Ocean Software
La pression est énorme bien avant la sortie du film, peut-être la sortie la plus médiatique depuis la création de la société (et avant celle de « Jurassic Park » dont ils s'occuperont aussi de la licence trois ans plus tard au prix d'un très gros chèque). Contrairement à « Robocop » où Peter Johnson s'était occupé seul de la programmation, des graphismes et de la musique sur ST/Amiga, une équipe de plusieurs programmeurs, graphistes et musiciens est constituée en interne pour le développement du jeu. L'objectif est de mieux contrôler l'ensemble du processus artistique du projet. Les enjeux financiers sont en effet énormes.
La construction du jeu reprend la formule éprouvée des précédentes adaptations de films sur lesquelles Ocean a déjà travaillé, consistant à identifier des scènes clés du film pour en faire des mini-jeux. « Batman » marque un peu l'aboutissement de cette formule que l'éditeur a su populariser. Un concept dont le contributeur clé est Simon Butler qu'il a expérimenté sur le jeu « Platoon » puis, maintes fois réajusté, perfectionné jusqu'à trouver un juste équilibre.
Nous avons commencé avec « RoboCop » en adaptant des éléments du jeu d'arcade mais en y ajoutant différentes sections car ce que nous voulions faire, c'était présenter des scènes clés du film qui ne s'intégraient pas nécessairement au jeu réel. Nous l'avions déjà fait avec « Platoon » où nous avions commencé à créer ces jeux multi-sections, ce que je ne pense pas que quelqu'un d'autre ait fait. Et donc c'était un peu comme trois ou quatre jeux en un, et nous l'avons refait avec « Batman ». Dans le jeu principal, nous voulions présenter la Batmobile, le Batwing, etc., nous avons donc créé ces sections. C'était très révolutionnaire.
Gary Bracey, Directeur d'Ocean Software
« Batman - The Movie » est donc bien un mélange de différents jeux formant un tout - Dans le premier et dernier niveau vous vous retrouvez avec un jeu de plateforme, dans le second et quatrième niveau avec un jeu de course/poursuite et dans le niveau trois un jeu de stratégie, certainement le niveau le moins apprécié des joueurs alors qu'il s'intégre assez bien à l'histoire et reprenant une scène clé du film où Batman doit identifier les combinaisons de produits nocifs que le Joker a contaminé. Trois programmeurs différents ont été impliqués dans le développement de ces différentes portions de jeu et créer ces niveaux distincts.
Les niveaux 1 et 5 ont été programmé par Mike Lamb qui s'est occupé aussi du concept général du jeu. Plus connu pour avoir travaillé sur les versions Zx Spectrum de « Robocop », « Arkanoid», « Target Renegade » ou « Wec le Mans », Mike Lamb a fait aussi les versions 8 bits (Zx Spectrum, Amstrad CPC) et codé aussi des versions ST/Amiga (sauf les sections 2.5D). C'était son premier jeu 16 bits. Dawn Drake et Robert Hemphill (aka Rob Hemphill) se sont occupé des graphismes des niveaux 1 et 5.
Pour trouver l'inspiration, Mike Lamb et Dawn Drake - qui avaient déjà collaboré sur la version 8 bits de « Robocop » - se sont même rendus à New York pour voir le film en avant-première. Le choix de transposer la licence à un maximum de plates-formes a aussi été pris, dont celle de faire de l'Amiga la plate-forme principale de développement, ce qui s'est avéré être un gros atout par la suite poussant ainsi la qualité du jeu vers le haut.
Pour les niveaux 2 et 4 c'est-à-dire ceux à bord de la batmobile et batwing, c'est Jon O'Brien qui se colle à la programmation, fort de son expérience sur la conversion de « Chase H.Q » de Taito, bien que les deux routines ne semblent rien à voir l'une avec l'autre, le niveau en « Batmobile » est bien plus réussi que ne l'a été « Chase H.Q »
Les versions 16 bits comportent un certain nombre d'images basées sur du matériel officiel du film mais l'équipe graphique d'Ocean n'avait pas accès à des scanners. En d'autres termes, toutes les images ont été dessinées à la main avec une souris avec ce qui était à l'époque le programme de dessin préféré de l'industrie, « Deluxe Paint » d'Electronic Arts.
L'un des graphistes d'Ocean est Bill Harbison (connu aussi comme William Harbison d'où sa signature dans les écrans), il a travaillé sur la version 16-bit de « Batman the Movie » (Atari ST, 1989) mais aussi par la suite sur « Push Over » (1992) et « Jurassic Park » (1993) dans sa version Amiga en dit plus :
Pendant la production du jeu, on nous a envoyé des storyboards de certaines des séquences d'action du film et des photographies de Warner Bros. Ceux-ci ont été utilisés pour créer le style graphique des niveaux d'arcade et des sprites de personnages, ainsi que le scénario et le déroulement du jeu.
Les bitmaps plein écran ont été dessinés à la main par Jon Palmer à partir d'une source photographique, les portraits du Joker et de Batman sur la ceinture utilitaire ont été dessinés à la main par moi. Le jeu a été essentiellement créé à partir du matériel source que nous avions et dans le délai incompressible qui nous a été donné.
Si on nous avait donné plus de matériel source pour d'autres scènes dans le film, je suis sûr qu'ils auraient été incorporés dans le jeu. L'une des raisons d'avoir les niveaux de conduite dans le jeu était que nous n'avions pas assez de matériel pour créer un jeu d'arcade d'action complet et qu'il fallait quelque chose pour combler ce vide.
Bill Harbison, graphiste chez Ocean Software
L'autre graphiste est John Palmer, et bien que ce fut sa première expérience sur Amiga, dès le chargement du jeu, on est ébloui par la qualité de l'illustration du héros. Une image de lancement qui n'est pas sans rappeler l'image de chargement dans « Robocop » de Peter Johnson hormis que l'une a été digitalisée et l'autre non.
Je n'avais jamais travaillé sur Amiga auparavant, donc produire les graphismes était pour le moins difficile. [:] Les patrons ont fini par remarquer que mes signatures devenaient de plus en plus grosses - je suppose que j'aspirais à être reconnu.
John Palmer, graphiste chez Ocean Software
Si la plupart des images fixes sont l'oeuvre de John Palmer, l'image de fin est elle signée Bill Harbison, une superbe image que peu ont dû voir étant donné la difficulté du jeu.
Ci-dessous l'ensemble des écrans fixes de la version Amiga
La version Atari ST sortie juste après celle Amiga bénéficie d'images supplémentaires entre les niveaux que n'a pas la version de Commodore...
En plus des traditionnelles séquences plateforme/action, l'équipe d'Ocean souhaitait créer des séquences de course/poursuite inspirées du jeu « Chase HQ » de Taito, dont ils avaient eux-mêmes créé une conversion en interne.
J'avais travaillé sur « Chase HQ », on m'a demandé de travailler sur la section en Batmobile du jeu et de faire une grande partie des graphismes d'arrière-plan dans ces sections 3D.
Bill Harbison, graphiste chez Ocean Software
Les versions ST/Amiga ont des différences parfois subtiles comme des rasters supplémentaires sur la version ST dans le niveau en batmobile, une résolution des images fixes différente et une fenêtre de jeu plus réduite sur Atari ST que sur Amiga, ou encore un thème musical supplémentaire sur Atari ST pour le niveau en Batwing.
Niveau 2 : A gauche la version ST et à droite la version Amiga
Rythmée et entraînante les musiques de « Batman the Movie » ne déçoivent pas avec un léger avantage pour la version Amiga, même si malheureusement aucune des musiques ne sont basées sur les thèmes emblématiques de Danny Elfman. Chaque niveau a son propre thème musical permettant au joueur de se projeter dans l'action, même si les deux premiers thèmes musicaux : L'usine Axis-Chemical et la course en batmobile avec ses rifts de guitare électriques restent les thèmes les plus connus, peut-être par le fait que peu de joueur ont dépassé ces deux niveaux:
Cette partie musicale fut assurée par Jonathan Dunn, musicien reconnu pour avoir composé de nombreuses mélodies sur 8 et 16 bits dont Arkanoid - Revenge od Doh», « Addams Family », « Lost Patrol », « Rambo III », « Terminator 2 »: s'est occupé de ceux de « Batman - The Movie ». En plus de la musique de la page titre, où la version Amiga échantillonnait un sample d'une séquence emblématique du film "Qui êtes-vous ?! [:] Je suis Batman!"
Le compositeur Matthew Cannon (« The Untouchabes », «Navy Seals », « Robocop 2 ») s'est chargé des conversions 8 bits mais aussi des effets sonores des versions 16 bits, il se souvient de cette période :
J'étais un peu nerveux sur les premiers projets, mais Mike était facile à travailler, et particulièrement encourageant lorsque j'écrivais la musique de son très excellent jeu Batman. Je me souviens avoir demandé à Mike comment il avait réussi le défilement pour le niveau de balancement de corde, ce que je trouvais incroyable. Je ne me souviens pas des secrets qu'il m'a révélé (c'était de la sorcellerie), mais je me souviens encore à quel point c'était excitant d'apprendre des maîtres programmeurs tels que Mike..
Matthew Cannon, Compositeur
La durée de vie du jeu assez courte puisqu'il vous faudra environ une vingtaine de minutes pour en voir la fin, pour peu que vous connaissiez et maitrisiez déjà le jeu ou avec le cheat mode (Dans l'écran titre, tapez « MAJJJJ» sur QWERTY ou ;QJJJJ sur AZERTY pour avoir des vies infinies, un message CHEAT MODE doit apparaitre, appuyer sur ‘F10' pour passer au niveau suivant), mais c'est dans la moyenne des jeux de ce type de l'époque. Les séquences plateformes nécessitent de nombreux essais pour mémoriser les ennemis et stratégies à adopter, tandis que les séquences en batmobile et batwing réclament plus de réflexes. Chaque niveau est chronométré donc réfléchissez mais pas trop non plus.
En Angleterre, Ocean réussi même à s'associer avec Commodore pour la sortie d'un bundle Batman qui comprenait à la fois l'ordinateur Amiga 500 avec les jeux « Batman: The Movie », le jeu de plateforme « New Zealand Story », le simulateur de vol « F/A 18 Interceptor » et l'utilitaire de dessin « Deluxe Paint II ». Le « Batman pack » fut un énorme succès, assurant à Ocean une publicité inespérée mais surtout à Commodore de passer sous la barre symbolique des 400 £ permettant au constructeur de revenir sur le devant face à l'Atari ST qui était bien plus populaire et bien moins chers.
Rapidement vous vous rendrez compte que le début du jeu est frustrant, la perte d'une vie vous renvoi obligatoirement au début du niveau. Et les différentes façons de mourir sont nombreuses : balles ennemis, grenades, gouttes d'acide et vapeur incandescente. Heureusement la maniabilité est bonne et on arrive rapidement à manier la bat-corde qui devient aussi une arme pour faire tomber les ennemis en diagonale contrairement à la batarang qui ne prend son utilité qu'en face à face. Vous apprendrez aussi à utiliser les plateformes pour passer rapidement à un niveau inférieur par exemple pour éviter un tir ennemi qui semble inévitable
La difficulté est assez progressive, les ennemis ont toujours la même façon de se déplacer. Ainsi au fur et à mesure on peut se construire facilement une approche tactique selon les écrans. Différents chemins possibles le chemin le plus court et le plus difficile ou plus long et plus facile mais en même temps avec un chrono qui continue à descendre.
Les ennemis font preuves d'une certaine intelligence. Ils peuvent grimper aux échelles pour vous traquer, tirer en diagonale vers le haut ou vers le bas, vous attaquant ainsi depuis des plates-formes en dessous ou au-dessus de vous. De plus, ils sont plus nombreux, et ils peuvent même vous tirer dessus alors qu'ils ne sont pas encore affichés à l'écran (ceux qui ont joué à « Platoon » voient de quoi je parle mais c'est "Batman" est plus jouable heureusement).
Quelle que soit la version à laquelle vous jouez vous devrez mémoriser la disposition et les réactions des ennemies avant de pouvoir traverser l'écran sans encombre et surtout sans perdre de vie: sinon retour à la case départ
Les graphismes sont plutôt agréables mais ne sont pas non plus exceptionnels (dommage qu'ils n'ont pas été digitalisés sur Amiga en 32 couleurs), surtout comparés aux meilleurs visuels Amiga de cette époque (« Shadow of the Beast »), ils restent néanmoins assez réussis et certainement au-dessus de la moyenne des jeux de 1989. Les sprites sont plutôt bien animés mais personnellement je les trouve trop petits, surtout quand on les compare au jeu « Batman The Caped Crusader ». Ils sont par contre suffisamment détaillés pour y reconnaitre certains ennemis, comme le fameux bras droit de Jack Napier, Bob avec ses cheveux châtains et son Duffle-coat vert. Par contre comme souvent dans ce type de jeu, on regrettera le peu de variété des ennemis.
Les couleurs sont néanmoins décalées pour ne pas totalement respecter le côté sombre voulu par le réalisateur, alors que dans le second niveau en Batmobile ils sont tout à fait dans l'esprit du film. On voit à ce titre qu'on a eu des graphistes différents selon les niveaux, ce qui est dommage c'est qu'ils n'ont, semble-t-il, pas eu la même approche artistique et la même vision du film.
A la fin du niveau, Napier tombe dans la cuve d'acide pour devenir le Joker.
Après avoir sauvé la journaliste Vicki Vale des griffes de l'affreux Joker dans le musée, vous devez vous échapper en batmobile à toute vitesse dans les rues de Gotham, évitant la circulation, les voitures ennemis et les barrages de police.
Conduire l'emblématique Batmobile en vue dos .. le rêve même si cela reste dans un jeu vidéo.
Au volant de la célèbre voiture, vous voilà engagez dans une course contre la montre qui s'enclenche dès le début de la partie. L'objectif étant de rallier l'autre bout de la ville aussi rapidement que possible tout en se frayant un chemin dans la circulation, en évitant d'encastrer les autres voitures et de se faire arrêter par les barrages de police. Une flèche vous indique les sorties à prendre
Ce second niveau est bien meilleur et plus original puisqu'il s'agit de conduire la batmobile dans les rues de Gotham City pendant un temps déterminé. La voiture est en vue arrière en 2.5d (les décors 2d sont stockés en mémoire dans différentes échelles) dans le style de « Chase H.Q » mais avec un moteur de jeu bien meilleur. Le défilement de la route est bien rendu, le scrolling est fluide et Les graphismes sont fins, les couleurs sont beaucoup plus proches de l'apparence du film que ne l'étaient le niveau plateforme. Ce niveau est un réel plaisir surtout au moment de bifurquer en jetant votre grapin sur le réverbère et prendre le virage à 90°. Ce niveau aurait pu faire l'objet d'un jeu a lui tout seul, et a fait on peut le dire à lui seul le succès du jeu.
Sur Amiga, Atari ST et PC, la voiture est donc en vue arrière, l'action est typique des jeux d'arcade de course/poursuite. L'une des innovations inspirée par le film est que pour tourner rapidement, aux intersections, vous devrez lancer un grappin au bon moment qui s'enroulera sur la base des réverbères faisant ainsi tourner la Batmobile à 90°et enchaine la portion de route suivant. Seulement trois essais par portion sont permis, au-delà un barrage de Police viendra mettre un terme à votre balade avec Vicki et vous faire perdre une vie. Tout cela nécessite un peu de pratique et un bon timing mais rien d'insurmontable.
C'est le graphiste Bill Harbison qui s'est occupé des graphismes de ce niveau.
J'ai d'abord travaillé sur le WEC Le Mans, puis grâce à cette expérience, j'ai été mis au Chase HQ. Après le succès de ce titre, la licence de Batman the Movie est arrivée et la décision a été prise de combiner Chase HQ et Robocop. J'ai donc travaillé sur les sections de course 3D de ce jeu.
J'ai apprécié Batman puisque que je me retrouvais de nouveau avec John et nous travaillions sur une licence encore plus grande sur une machine plus puissante (Amiga/ST) avec beaucoup plus de couleurs.
Bill Harbison, graphiste chez Ocean Software
Le jeu a fait l'objet de nombreuses previews notamment dans le magazine génération 4, révélant ainsi des graphismes différents du jeu final notamment pour le niveau en batmobile sur Atari ST avec une vue latérale comme sur Amstrad CPC au lieu de la vue arrière comme sur Amiga.
Au final la version Atari ST a opté pour le même mode de vue que sur Amiga mais on ne sait pas pourquoi ce changement et surtout pourquoi à l'origine la version ST était différente de celle développée sur Amiga. On retrouvera ce type de vue latérale abandonné pour « Batman » dans le très mauvais jeu d'Ocean « Total Recall » sur ST/Amiga avec la poursuite en taxi. Malheureusement malgré mes recherches, je n'ai pas pu mettre la main sur une preview ST..
De gauche à droite, preview Atari ST, version Amstrad CPC, » Total Recall » niveau 2.
Assez bizarrement la compilation budget « The Hit Squad » sortie pourtant en 1990 reprend les captures d'écran des previews ST... un comble !
En poussant la critique, la séquence aurait gagner en profondeur s'il y avait eu un peu plus de variété dans les décors, par exemple rejoindre la forêt et entrer dans la batcave, continuer dans la forêt puis seulement après arriver dans les rues de Gotham comme c'est le cas sur la version Amstrad CPC. Oui mais voilà le jeu devait tourner sur un simple Amiga 500 et un Atari 520 STF/STE: il fallait alors toucher le public le plus large possible. Dommage que les extensions mémoires n'ont pas été prise en compte, comme souvent vous allez me dire.
Le troisième niveau prend la forme d'un casse-tête où les mécaniques du jeu rappellent celle du Mastermind. A l'aide de votre super ordinateur vous devez identifier certains produits de consommation courantes contaminés par le Joker qui prit séparément n'ont aucun effet mais une fois combinés se révèlent être un poison mortel. Votre tâche est d'identifier trois produits toxiques en moins d'une minute, en six essais.
De toutes les séquences du jeu, c'est probablement celle qui a le moins de fans, sans doute faute d'action. A l'origine cela devait être le deuxième niveau mais heureusement la partie batmobile a été déplacé. Un niveau réflexion entre deux phases d'action, sans prétention mais assez bien pensé, qui s'inscrit parfaitement dans l'esprit du film et du jeu, et qui a le mérite de casser la monotonie avant de passer au survol de Gotham en Batwing. Cette phase n'est pas sans rappeler le niveau d'identification du suspect dans « Robocop » hormis qu'il faudra impérativement réussir le challenge pour passer au niveau suivant. Ce défi est néanmoins tout à fait abordable pour peu qu'on réfléchisse un peu.
Côté programmation, c'est Alan Short (qui nous a quitté en 2012) qui a fait le job. Pour les graphismes on retrouve bien la patte de John Palmer qui a fait notamment l'image de Batman en introduction et dans le menu. La partie musicale est toujours assuré par Jonathan Dunn
Conseils : Utilisez vos méninges, soyez rapide car vous n'avez qu'une seule petite minute.
C'est le carnaval de Gotham, pour attirer le plus de monde, le Joker promet de distribuer des liasses de billets dans les rues de la ville. Pourtant le Joker prépare un plan machiavélique à l'intention de cette foule inconsciente du danger. A l'intérieur d'énormes ballons qu'il a gonflé avec son gaz toxique.
A bord du Batwing, vous devez couper les cordes retenant les ballons au sol afin qu'ils s'envolent et soient hors de portée de la population. Il faudra non seulement couper au bon endroit, ni trop haut pour ne pas faire éclater le ballons ni trop bas pour ne pas faire s'écraser le batwing mais aussi trouver la bonne vitesse car le temps est compté.
Dans cette séquence, nous sommes de retour dans les rues de Gotham City, mais la Batmobile a été remplacée par la Batwing. Le Joker organise un carnaval en ville, avec d'énormes ballons remplis de gaz mortel, et c'est à vous de couper les ficelles d'autant de ballons, une centaine en fait, en évitant au possible d'écraser la batwing sur les camions ou sur les ballons eux-mêmes.
Comme pour la conduite automobile, vous voyez l'action de derrière l'avion dans les "grandes" versions, et d'en haut dans les petites. Sur PC, Amiga et ST, vous pouvez contrôler vous-même la hauteur de l'avion au-dessus du sol, ce qui est nécessaire pour frapper les cordes et non les voitures ou les ballons. Encore une fois, la version PC se débrouille très mal, avec des commandes maladroites et une vitesse lente.
Dans la même veine que le second niveau, le quatrième niveau tout aussi réussi vous place au commande de la Batwing. Pour réussir ce niveau vous devrez couper les cordes des ballons dans lequel le Joker a caché un gaz toxique, et censé être lâché lors de la fête nationale de Gotham City.
Conseils : Couper les cordes de façon nette, ne touchez pas les ballons, évitez de toucher le sol
Le cinquième et dernier niveau rejoue la scène finale du film, consistant à gravir la cathédrale de Gotham du haut de laquelle le Joker essaye de s'enfuir en hélicoptère. C'est de loin le niveau le plus long et le plus difficile du jeu même si ce n'est en fait qu'un redit graphique du premier niveau puissance 10 en difficulté. La cathédrale est vraiment immense (on se rend compte du chemin parcouru lorsque le Joker tombe de celle-ci) et vous devez vous attendre à beaucoup plus d'ennemis que dans l'usine, mais aussi à plus de dangers tels que des sols qui cèdent lorsque vous marchez dessus ou des impasses. Il est aussi plus difficile de s'y repérer, un plan ne sera pas de trop, pour savoir où on est et où aller. Cela signifie que le temps est d'autant plus un problème qu'il faudra gérer que dans le premier niveau.
Le Joker vous donnera beaucoup de fil à retordre jusqu'au dénouement final où à coup de bat-corde lancé au bon endroit et au bon moment, vous devriez le faire tomber de son échelle: et finir par entendre son rire machiavélique.
Il est peu probable que vous traversiez la cathédrale indemne sans recommencer plusieurs fois, comme pour le premier niveau apprendre la disposition des ennemis et leur mécanisme est crucial tout comme le bon chemin à emprunter.
Globalement le jeu est très bien accueillit par la presse soulignant que si le premier niveau est intéressant c'est surtout le niveau 2 en batmobile qui justifie l'achat du jeu à lui seul.
La version Amiga étant la version de développement est sortie la première et donc c'est souvent elle qui a été testé dans les magazines.
Le Génération 4 n°16 de novembre 1989 teste donc le jeu dans sa version Amiga et lui octroie un très bon 93% d'intérêt général et surtout un 90% en graphisme, précisant dans un encart « La version ST annoncée s'annonce moins réussi » certainement par le fait qu'à ce moment là le journaliste avait en tête un niveau en batmobile différent sur ST (comme annoncé dans le numéro précédent). Bizarrement on retrouve dans ce test des images du niveau en plateforme avec l'ancien bandeau en bas
Le ST magazine n°35 de novembre 1989 teste lui bien la version ST qui a bien le niveau en batmobile vue de l'arrière. Au final le jeu obtient un 19/20
Tilt magazine n°71 de novembre 1989 teste aussi la version Amiga et lui donne un jolie 17/20.
Malgré son test plutôt positif, Joystick hebdo n' accorde au jeu qu'un petit 13/20 et très moyen 10/20 en animation !
Ocean et son directeur, Gary Bracey sont particulièrement fier du concept et du développement du jeu.
Tout le monde voulait faire « Batman ». Je ne pense pas que quiconque voulait faire « Robocop » à l'époque - évidemment, c'était un inconnu et en lisant le script, cela aurait pu aller dans les deux sens. Ça aurait pu être un film de série B complètement merdique, ou un très bon film de science-fiction culte. Heureusement ce fut ce dernier, c'est devenu un classique et nous avons fait du bon travail sur le jeu. Il est devenu le titre le plus réussi de l'histoire de l'océan à ce moment-là, et un des titres les plus réussis au monde pour n'importe quelle entreprise, ce qui nous a donné beaucoup plus de crédibilité, et aussi avec les studios de cinéma qui au début considérait simplement les jeux informatiques comme un autre vecteur de marketing pour leurs films.
Mais je pense qu'après « Robocop », ils ont réalisé qu'ils pouvaient gagner de l'argent avec les jeux informatiques. Donc, tout d'un coup, nous avons eu beaucoup plus de script de film des studios qui poussaient pour que nous en fassions des jeux parce qu'ils voulaient une part du gâteau. J'ai été inondé de scénarios de films, ce qui était super parce que j'adorais les lire de toute façon, et il y avait beaucoup de choses intéressantes autour.
Gary Bracey, directeur Ocean Software
Après le raz de marée « Batman », et ce nouveau succès, la société a continué dans les licences ces films, toujours plus, toujours plus
1990 : Nightbreed, Robocop 2, Total Recall
1991 : Arachnophobia, Darkman, Hudson Hawk, Navy Seals, Simpsons, Terminator 2
1992 : The Addams Family, Cool World, Hook, Lethal Weapon, Robocop 3
1993 : Jurassic Park, Universal Monsters (une démo jouable existe mais le jeu n'est jamais sorti)
1994 : Jurassic Parl part 2
1995 : Addams Family Values, Waterworld
Mais les affaires de la société de logiciels britannique ont commencé à se compliquer alors qu'Hollywood commençait à en réclamer toujours, le virage a été pour « Jurassic Park » dont la conversion n'a pas laissé beaucoup de souvenirs positifs hormis une note salé pour l'éditeur.
Dans une interview, le co-fondateur d'Ocean David Ward disparu en 2022 a raconté le changement financier et stratégique opérés par les majors sur les licences de film.
« Batman » a été notre première expérience que la seule façon d'avancer était de fusionner avec d'autres sociétés en raison des coûts financiers importants nécessaires pour acheter une licence, sans parler du coût de développement du jeu. « Jurassic Park » fut la dernière licence de film que nous ayons faite. Et cette licence nous a coûté trois millions de dollars - notre première licence était de quelques milliers. Nous étions donc passés de quelques milliers à des millions de dollars en l'espace de dix ans.
David Ward, Co-fondateur d'Ocean Software
Gary est toujours heureux de défendre de nombreuses licences de films.
Il y a des liens avec des films dont je suis à ce jour incroyablement fier d'avoir fait partie. Et tout cela grâce au talent des équipes. Depuis que j'étais là-bas à Ocean, cela a commencé avec « Top Gun », puis « RoboCop », « Platoon », « Untouchables », « Batman » et « The Addams Family », qui sont devenus mes préférés. Nous avons conçu cela en interne et c'était tellement intelligent. Le concept était un peu stéréotypé, avec des plates-formes et des trucs comme ça, mais c'était beau à jouer, le look était brillant et c'était bien conçu. C'était juste très amusant à jouer.
Gary Bracey, directeur Ocean Software
Le graphiste Bill Harbison garde aussi de très bon souvenir de cette période.
Après des vacances, nous sommes revenus travailler sur notre prochain projet. Une fois que vous avez terminé un jeu, vous l'oubliez à peu près et vous êtes plus intéressé par le suivant. Mais Batman occupera toujours une place spéciale dans mon coeur car c'était mon premier titre 16 bits et, bien que nous ne l'ayons pas vu à l'époque, c'était une énorme licence de jeu et un produit assez influent.
Bill Harbison, graphiste chez Ocean Software
Et d'ajouter :
Ocean occupe une place spéciale dans mon coeur car c'était mon premier emploi et l'industrie était à un endroit où les équipes étaient suffisamment petites pour s'en souvenir vingt ans plus tard.
Bill Harbison, graphiste chez Ocean Software
Pour conclure, le jeu « Batman - The Movie » n'est sans doute pas le premier jeu qui vient à l'esprit quand on parle des 16 bits mais, et sans rien dénigrer aux versions 8 bits, son niveau à bord de la Batmobile en 2.5d fut un formidable argument de vente pour passer aux nouvelles machines ST/Amiga.
Le jeu n'est néanmoins pas exempt de défauts, mais grâce à la variété des niveaux, il reste dans l'ensemble bien au-dessus des productions de l'époque.